La maison Lancel,
entre tradition et modernité

Archives lancel
Ce sont près de 3 500 pièces qui composent les archives de la maison Lancel.

La maison Lancel, qui a récemment fêté ses 140 ans, nous a ouvert ses portes dans le cadre de la 36édition des Journées européennes du patrimoine.
Située dans un très bel hôtel particulier du XVIIarrondissement de Paris, celle-ci nous a permis de découvrir quelques-unes de ses précieuses pièces d’archives et de visiter l’atelier des prototypes où sont élaborés, chaque année, quelques modèles phares.
Cette visite exceptionnelle fut l’occasion de revenir sur l’histoire et les évolutions de cette emblématique maison de maroquinerie parisienne, qui s’est fait la promesse de proposer un « luxe accessible qui sait accompagner les modes de vie de son temps ».
Plongée dans les coulisses de Lancel !

L’histoire de la maison Lancel

La visite débute par l’exposition exceptionnelle de quelques-unes des 3 500 pièces qui composent les archives de Lancel. Il s’agit de pièces de petite maroquinerie, de maroquinerie, de bagages, d’objets d’art de vivre et d’art du cadeau mais également d’archives papier, toutes patiemment acquises au fil des ans auprès de particuliers, lors de ventes aux enchères ou de salons, en boutiques vintage ou sur internet. La découverte de certaines de ces archives, qui sont autant de témoignages d’époques et de modes de vie, fut l’occasion d’une plongée passionnante dans l’histoire de l’une des plus grandes maisons de maroquinerie française.

De l’artisanat au commerce de luxe

Lorsqu’Alphonse et Angèle Lancel créent leur marque en 1876, celle-ci est exclusivement dédiée aux accessoires pour fumeurs. Il faut attendre 1901 et l’arrivée de leur fils Albert à la tête de l’entreprise familiale pour que s’opère le premier véritable tournant dans l’histoire de cette dernière. L’apport d’Albert Lancel va, en effet, être considérable. Celui-ci va tout d’abord définir les quatre principaux univers de la marque, que sont la maroquinerie et l’accessoire féminin et masculin, le bagage et le voyage et, enfin, l’art de vie et l’art du cadeau, aujourd’hui disparu.
C’est avec Albert Lancel, qui lui consacrera toute sa vie, que la maison  va définitivement passer du stade artisanal à celui de commerce de luxe, comme en témoigne son installation au n° 8, place de l’Opéra. Le magasin, très novateur pour l’époque, est un véritable concept-store avant l’heure où se vendent, outre les créations Lancel, toutes sortes de produits : des parfums, de l’horlogerie, des services de mariage mais également des luminaires et du petit mobilier. L’enseigne abrite même un auditorium, permettant ainsi la vente de disques et de transistors radio. L’offre, on le voit, est volontairement très large. Car bien que soucieux de conserver les valeurs de la maison familiale, Albert Lancel souhaite insuffler un vent de modernité à la marque, qui multiplie les innovations et dépose ainsi de nombreux brevets techniques. Parmi les nouveautés emblématiques d’alors, citons le briquet automatique (primé à l’Exposition universelle de 1937), le premier poste de radio portable « Bambino», le sac « Parapluie » ou encore la malle « Aviona ». Le goût pour la fantaisie propre à Lancel va également donner naissance à ses célèbres « sacs à malices ». Si l’un surprend par ses compartiments destinés à ranger cigarettes et allumettes et par son cendrier de poche ; l’autre, dite valise « Kangourou », étonne par sa légèreté et sa fonctionnalité, deux caractéristiques très appréciables en cette période d’essor des congés payés et des voyages.
L’entreprise continue de se développer et compte déjà, dans les années 50, plus d’une dizaine de boutiques dans les grandes villes françaises. La décennie suivante, qui est marquée par de nombreuses collaborations – notamment avec Salvador Dali, à l’origine du sac « Daligramme »,  revisité dans les années 2000 – et par la création de sacs résolument modernes et originaux, renforce encore l’expansion de la marque.

Du deuxième âge d’or au tournant des années 2000

À la fin des années 70, Lancel est rachetée par les frères Edgar et Jean Zorbibe, jusqu’alors sous-traitants de la marque. Ce sera le deuxième âge d’or de la maison, à laquelle ils vont conférer une dimension internationale en développant les points de vente, non plus seulement en France, mais à l’étranger, dans près d’une quarantaine de pays. Lancel, qui se démarque par ses campagnes publicitaires, connaît alors de grands succès commerciaux, avec les bagages rouges de sa ligne « Palmyre » et le sac seau « Elsa », devenus depuis iconiques des années 80 et 90.
Après son acquisition par le groupe suisse Richemont – numéro deux mondial du luxe, spécialiste de l’horlogerie et de la joaillerie (Cartier, Van Cleef & Arpels, Piaget, Montblanc…) – dans les années 2000, Lancel opère un nouveau tournant dans son histoire et se recentre, pour des raisons stratégiques, sur le sac femme. Ce sera l’époque des it-bags et des égéries telles Brigitte Bardot, Isabelle Adjani, Carla Bruni, ou encore des sacs inspirés de modèles d’archives, tel « Premier Flirt », réédition du fameux sac seau.
En 2016, Lancel célèbre ses 140 ans avec « Le Huit », en hommage à la boutique du n° 8, place de l’Opéra, ainsi qu’avec le « Charlie », inspiré d’un modèle des années 60.
Deux ans plus tard, la maison est reprise par le groupe maroquinier italien Piquadro. Ce rachat donne lieu, depuis, à un travail de repositionnement de la marque, qui cherche notamment à retrouver sa fantaisie d’origine, qu’elle revendique aujourd’hui comme « une attitude, une identité, un principe d’élégance ».

Lancel sac seau Elsa
Le sac seau « Elsa », devenus depuis emblématiques des années 80 et 90.

L’atelier des prototypes

La visite se poursuit par la découverte de l’atelier des prototypes, créé en 2008 et dirigé par un Compagnon du Devoir. Quatre personnes, dont le responsable d’atelier, y officient quotidiennement au rythme des deux grandes collections annuelles, auxquelles s’ajoutent des collections capsules et des commandes spéciales.
Le savoir-faire maroquinier de la maison Lancel se manifeste pleinement à travers l’attention et le soin qu’elle accorde aux choix des peaux et aux finitions de ses modèles. Ceux-ci sont dessinés à Paris et réalisés – en cuirs lisses, grainés, exotiques ou brillants – dans la région de Florence, en Italie, où se situent les ateliers de fabrication du groupe Piquadro.
Le processus de création des sacs se déroule comme suit : la direction ou le service marketing de Lancel commande un modèle de sac à l’atelier des prototypes. Celui-ci cherche l’inspiration, en allant notamment puiser dans l’histoire et les archives de la maison. Il arrive parfois que le bureau de style ait une idée précise du modèle et/ou du type de peau qu’il veut utiliser pour celui-ci. Le sac « Pia » a ainsi été totalement repensé à partir d’un précédent modèle car la styliste voulait le retravailler en chèvre brute, dont le grain et le caractère particuliers correspondaient parfaitement. Il a toutefois fallu, compte tenu de la grande élasticité de cette peau, changer toute la main du cuir en ajoutant un renfort afin d’obtenir quelque chose qui soit à la fois souple et suffisamment structuré sur son contour pour ne pas s’affaisser. De même pour le sac « Charlie », inspiré d’un modèle des années 60. Le choix s’est porté sur le buffle, plus compliqué à trouver, mais dont la peau très hétérogène permettait d’obtenir un rendu très esthétique, avec un rabat au grain volontairement plus grossier que le reste du sac.
Les stylistes collaborent étroitement avec le bureau de style, auquel ils proposent différents dessins, qu’ils peaufinent jusqu’à l’obtention d’un modèle jugé satisfaisant. Un premier prototype est ébauché, non pas en cuir – trop coûteux – mais dans une matière utilisée pour renforcer le cuir qui a une main très similaire et qui permet d’avoir un visuel très précis, très fidèle à la réalité. Il est ensuite analysé, éventuellement amélioré puis, une fois validé, réalisé en cuir à partir d’un patronage et d’un dessin sur ordinateur permettant d’obtenir le patron, les gabarits et les cartons qui servent à couper les différentes pièces. Si l’atelier des prototypes utilise principalement le veau et la vachette, il lui arrive également de travailler les cuirs exotiques crocodile (mat et brillant), galuchat, karung, lézard, patte d’autruche ou raie, notamment pour les commandes spéciales qui illustrent, elles aussi, tout le savoir-faire maroquinier de la maison Lancel.

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Rédaction & photos Garance André

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