La botte camarguaise, labellisée après la charentaise
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Dans sa boutique-atelier installée dans les Cévennes, Jimmy Grandadam, professionnel de l’écologie reconverti, répare les chaussures et fabrique et commercialise ses propres sacs et sandales. Une passion qu’il partage lors de stages grand public.
Rien ne prédestinait Jimmy Grandadam à sa vie actuelle d’artisan-commerçant à Florac Trois Rivières, en Lozère. Le début professionnel de ce fils d’infirmiers, né en Lorraine, rassurait ses parents. C’était sans compter sur son coup de foudre pour une région splendide et peu peuplée. Envoyé pour une mission de trois ans dans le parc national des Cévennes, il n’a pas envie de repartir. Pour rester, il va se reconvertir dans l’artisanat du cuir.
En 2016, à 30 ans, il s’inscrit aux Compagnons du Devoir mais faute d’un nombre suffisant d’inscrits, il négocie un an de convention de stage auprès de ceux-ci, formation qu’il prolonge en électron libre durant six mois. Pendant un an et demi, il se frotte aux métiers du cuir à Mende, Nancy, Lyon et Limoges, chez des artisans « avec lesquels il a envie d’apprendre ». Alors qu’il visait initialement la maroquinerie, il bénéficie du « savoir-faire extraordinaire » d’un cordonnier à Mende, qui lui donne goût à la réparation.
En 2017, à l’issue de sa formation, il saisit une opportunité en ouvrant une nouvelle maroquinerie-cordonnerie à Florac, la seule existante dans le village ayant fermé ses portes deux ans plus tôt. La Maison Grandadam, une belle boutique-atelier de 50m2, à la fois vintage et chaleureuse, est née. La cordonnerie représente aujourd’hui un quart de son chiffre d’affaires. S’adressant à une clientèle rurale au pouvoir d’achat parfois limité, il a fait le choix de ne pas se faire agréer par Refashion et son système de Bonus Réparation. « L’idée est bonne. Mais mes prix sont déjà bas, donc pour pouvoir déduire ces bonus, il faudrait les augmenter ! Cela ne changerait rien pour mes clients et je serais contraint à de nouvelles démarches. » Outre la réparation de chaussures, Jimmy Grandadam fabrique et vend ses propres créations. Sa maroquinerie – sacs, pochettes, ceintures et autres bretelles – est entièrement cousue et teinte à la main.
Depuis cinq ans, il s’est aussi lancé dans la conception de sandales artisanales pour hommes et femmes, répondant à la demande de sa clientèle. Elles ne sont en revanche pas cousues main mais à la machine. « Cela me demanderait deux heures de plus par paire et augmenterait le prix de 85 euros. Je préfère vendre une paire à un prix abordable (105 à 115 euros), sachant que la machine ne fragilise pas les modèles pourvus d’une semelle soudée », explique-t-il.
Côté création, l’artisan explique essayer de « de simplifier au maximum, avec des lignes épurées », tout en vantant la « mine d’or pour aller chercher des idées de montage que représente la littérature » de la filière. « Le cuir existe depuis des dizaines de milliers d’années. Quand on me dit « vous l’avez créé », je me dis qu’il faut rester modeste. »
Côté sourcing, Jimmy Grandadam table aussi sur le made in France. Il achète ses cuirs bruts, « essentiellement de la vachette et un peu de chèvre et de porc pour quelques doublures » à la tannerie vosgienne Ciulli. « Je peux leur acheter des peaux à l’unité et j’apprécie leur éthique sociale : ils fonctionnent en Scop (société coopérative de production). » Ses teintures sont aussi françaises. Pour les accessoires de cordonnerie, l’artisan collabore avec l’entreprise Fages & Aiglon basée à Aubord près de Nîmes, négociant en cuirs et peaux et fournisseur de produits destinés à la fabrication et la réparation d’articles en cuir.
Pour compléter son offre maison, vendue à des prix plutôt accessibles (de 90 à 480 euros prix boutique pour un sac), et répondre là encore à un vœu de ses clients, Jimmy a ajouté des chaussures masculines en cuir fermées, réalisées par un ami installé dans l’Aveyron. « Je ne dispose pas des machines pour les fabriquer moi-même », précise-t-il.
Si le village de Florac ne compte à l’année que 2 000 habitants, il attire de nombreux touristes l’été, adeptes de la randonnée en moyenne montagne. La Maison Grandadam réalise ainsi la moitié de son chiffre d’affaires pendant les beaux jours, entre mai et fin septembre. En hiver, son dirigeant part à la rencontre des chalands en participant aux marchés artisanaux à travers toute la France, « de plus en plus nombreux ». Il vend aussi un peu (environ 5% de son chiffre d’affaires) et ce, toute l’année, via son site internet. « Je n’ai pas investi dans son référencement. Je le considère en effet surtout comme une prolongation de l’activité de ma boutique ou des marchés, permettant aux personnes ayant vu mes produits de commander à distance », détaille-t-il. En revanche, présent sur Facebook et Instagram, il admet qu’il aurait sans doute intérêt à intensifier son activité sur les réseaux sociaux. « C’est devenu une excellente porte de communication. Mais il faut du temps pour s’en occuper. »Depuis deux ans, Jimmy Grandadam a également ajouté une activité complémentaire et conviviale : l’organisation d’ateliers de création de sacs ou ceintures pour le grand public, pendant une demi-journée, proposés via la plateforme Wecandoo. « J’en organise une fois par semaine en été, et une fois par mois le reste de l’année. Cela attire des touristes pendant la saison touristique, tandis que des personnes de la région, mais aussi de plus loin, Clermont-Ferrand ou Montpellier, y assistent durant le week-end ». De quoi réaliser désormais 10% de son chiffre d’affaires. Celui-ci, malmené pendant la période Covid, reste modeste, mais Jimmy Grandadam ne regrette manifestement pas son choix. « Je n’évalue pas mon bien-être en fonction de ma rémunération, sourit-il. En étant à mon compte, j’ai découvert le bonheur de pouvoir gérer un projet de A à Z. »
Et contre toute attente, lui qui pensait ne pas être manuel du tout, il s’est découvert de réelles compétences dans ce domaine.
Jimmy Grandadam n’est pas le seul dans les alentours de Florac à avoir plongé dans l’univers du cuir. Quand il s’est installé, il était le seul artisan de sa catégorie. « Aujourd’hui, on compte huit maroquiniers à 20 kilomètres à la ronde. Car, ici, si on veut rester, il faut créer son activité ! Mais je suis le seul à posséder ma boutique, les autres vendent sur les marchés ou via des multimarques spécialisés dans l’artisanat local. »
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Rédaction Sophie Bouhier de l’Ecluse
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