« La Minute SLF x LFD » Laura Breban, cofondatrice de Trace For Good
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Ingénieur de formation, Clément Hoo a rejoint la cordonnerie familiale, spécialiste des chaussures de randonnée, pour contribuer à son essor. Son profil colle à celui de la jeune génération, plus sensible à l’argument de chaussures durables et réparables, qui fréquente de plus en plus la boutique-atelier.
Diplômé d’un Master en Management Industriel de l’EIGSI de la Rochelle, Clément Hoo aurait pu faire toute sa carrière au sein de grands groupes. Mais à 27 ans, il y a trois ans, il fait un choix audacieux : celui de rejoindre le giron de la cordonnerie fondée en 1960 par son grand-père et reprise en 1987 par son père. Basée dans le quartier parisien de la Bastille, À la Ville À la Montagne est spécialisée dans la réparation mais aussi, depuis une vingtaine d’années, dans la vente de chaussures de randonnée et de montagne. « J’avais à cœur de revenir dans l’entreprise familiale pour l’aider à se développer, notamment en termes de ventes, en me servant de ce que j’avais appris. L’avantage de ma formation d’ingénieur généraliste était en effet que je pouvais l’appliquer un peu partout », explique-t-il. Dans un premier temps, il passe un an dans l’atelier afin « de s’imprégner de son atmosphère ». Il est aussi amené à l’optimiser et le réorganiser à la faveur de la paralysie de la période Covid.
La particularité de l’enseigne est la polyvalence de son équipe. « Nous nous servons tous de notre expérience de cordonnier, mais aussi de pratiquant de la randonnée, pour conseiller nos clients. Nous connaissons à la fois les modèles que nous réparons et les besoins de ceux qui vont les porter. » Toutes les marques proposées dans la boutique-atelier, telles que les françaises Paraboot ou Le Soulor, les allemandes Lowa et Hanwag, ou l’italienne Asolo, possèdent un profil résolument durable. La majorité est made in Europe (France, Italie, Allemagne, voire Europe de l’Est), une fabrication de proximité plébiscitée par la clientèle. Et elles ont été sélectionnées pour leur haut degré de réparabilité, pour « 95% d’entre elles. Notre but est que le client qui vient chez nous achète ses chaussures pour longtemps », souligne Clément Hoo. La cordonnerie a d’ailleurs mis en place des partenariats historiques avec les marques pour assurer leur service après-vente. « L’univers de la randonnée est en avance sur le sujet et les maisons dont nous distribuons les produits sont conscientes depuis longtemps de l’enjeu de la réparation. »
Ces marques sont en revanche encore timides dans le domaine de l’éco-conception, même si Clément Hoo relève une « volonté de commencer avec des semelles recyclées. L’idée est d’abord d’accentuer le levier de la réparation. Les process de fabrication – le collage, la couture, etc. – sont en effet compliqués à changer sans impacter la qualité ». Et de poser une question de fond : « qu’est-ce qui impacte le plus l’environnement : une chaussure traditionnelle fabriquée avec un process et des matériaux comme le cuir mais qui va durer dans le temps, parfois jusqu’à 30 ans, ou une chaussure éco-conçue mais qui va être moins résistante à l’usage ? »
À la Ville À la Montagne reçoit ainsi parfois des clients qui ont retrouvé dans leur grenier une vieille paire qui va pouvoir être réutilisée après une « remise en état. Si on éduque le client sur l’entretien de sa chaussure, il peut la faire durer et réparer une, deux ou trois fois », observe-t-il. Un discours qui passe de mieux en mieux, en particulier auprès des jeunes générations, notamment les trentenaires. Lesquels, cela tombe bien, ont redécouvert les joies de la randonnée en France quand ils ont été privés de partir à l’étranger en période Covid. Ils se sont ajoutés à la « clientèle historique » d’À la Ville À la Montagne, soit « des retraités ayant le temps de randonner ». Le soufflé n’est pas retombé depuis et a contribué au bel essor de la cordonnerie. Alors que les mentalités ont évolué en profondeur sur le sujet du réemploi, l’entreprise a aussi surfé sur la vague en communiquant via les réseaux sociaux et des publicités dans les médias. « Nous avons désormais à peu près 800 paires à réparer pour le mois à venir, contre 600 avant la pandémie. De fait, notre équipe est passée à sept personnes, contre quatre en 2019. » Poussé par ces vents favorables, l’atelier, trop à l’étroit dans l’espace de 20m2 qui lui était dédié au sein de la boutique, l’a quitté fin 2022. Et ce, pour un local bien plus spacieux et agréable de 140m2, situé à quelques centaines de mètres, rue du Chemin Vert.
Pour Clément Hoo, pas de doute, son équipe et lui ont pour vocation d’accompagner le grand public vers une consommation plus responsable. Et « il est important de lui faire comprendre qu’il ne faut pas hésiter à pousser la porte d’un cordonnier, même si c’est seulement pour poser des questions ».
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Rédaction Sophie Bouhier de l’Ecluse
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