Comment s’est construit le projet ?
« J’ai été mandaté pour concevoir une chaise de lecture destinée à un lieu patrimonial inscrit au titre des monuments historiques. Elle a fait l’objet d’un partenariat inédit puisqu’elle a été prototypée avec l’Atelier de Recherche et de Création du Mobilier national (ARC) fondé par André Malraux en 1964. Cet atelier détient un savoir-faire de haute technicité. Il conçoit le mobilier destiné à l’aménagement des institutions publiques, ministères, ambassades… Dans ce cas précis, il ne s’agissait pas de créer une pièce unique d’exception mais une édition en série destinée à un large public. C’est extrêmement gratifiant de proposer un objet accessible à tous. Avec l’ARC, nous avons mené un important travail d’ergonomie durant presque un an. Les premiers dessins, notamment des pieds, ont été modifiés à plusieurs reprises. Le travail de designer sans ping pong n’existe pas ! Pour l’éditer, un appel d’offres a été lancé. C’est le fabricant basque Alki qui l’a remporté. « Orria » signifie la page d’un livre en basque.
Quelle est la spécificité de cette chaise ?
Nous avions envie d’une chaise sobre, assez discrète, pour qu’elle puisse se fondre dans le décor monumental de la salle Ovale, sans aucune dissonance. Elle devait relier la tradition française avec l’avant-garde de l’artisanat contemporain. L’usage, bien sûr, nous a guidés. Celui du visiteur, du lecteur, quand il est assis confortablement, lorsqu’il déplace la chaise en silence. L’usage nous a poussé aussi à aller plus loin dans la légèreté car la chaise doit pouvoir être soulevée sans effort, empilée au moment de l’entretien et posée par les accoudoirs sur la table. La finesse de ses jonctions reflète un important travail d’ébénisterie. Nous n’aurions pas pu obtenir une assise aussi fine il y a 50 ans.
Pourquoi avoir choisi le bois et le cuir comme matériaux ?
Il s’agit d’une chaise de collectivité à usage intensif. Le bois et le cuir relèvent d’un choix ambitieux. Les matières synthétiques n’ont plus le vent en poupe ! Le bois est un matériau d’avenir. Il s’est tout de suite imposé. Il traverse le temps et fait le lien entre les styles. On pourrait en dire autant du cuir … Nous avons choisi le chêne, qui est le bois français par excellence, et un cuir pleine fleur tannage végétal de MGP, tannerie recommandée par l’ARC à Alki. C’est un cuir de vaches élevées en France et labellisé Leather Working Group (LWG) Silver. Avec le temps, le cuir va se patiner et l’assise sera de plus en plus belle. Les accoudoirs en porte-à-faux participent au confort. Le cuir était la matière la plus adaptée aux usages que nous recherchions. Sa couleur noire est naturellement élégante. Elle convient parfaitement avec les sous-mains en cuir posés sur les tables.