La mode n’aime rien tant que s’inventer des idoles et des totems, des engouements d’une saison ou des compagnons de toute une vie. Gageons que ces deux nouvelles french Icon ! seront de la seconde catégorie. Et puisque depuis plusieurs saisons déjà, on ne voit plus qu’eux aux pieds des fashionistas, calés sous leurs bras ou encore exhibés comme des nouveaux trophées sur les réseaux sociaux, c’est bien encore de nouvelles pépites mode dont il s’agit encore ici avec les Loubishark et le Bambino !
Exit le stiletto et autres escarpins vertigineux qui ont fait la renommée et façonné l’image glamour de la marque, à l’instar de nombreuses autres marques de luxe. Christian Louboutin imagine lui aussi, son modèle de sneaker, la Loubishark. Lancé en 2020, les 600 premières paires de ce modèle unisexe sont numérotées. Petite prouesse de savoir-faire et de complexité au service du confort, ce ne sont pas moins de 13 pièces de matériaux différents, à savoir la semelle en gomme et néoprène, des empiècements de résilles mesh, du veau lisse, des détails de spikes argentés ou dorés, qui sont aussi l’une des signatures de la maison posés à l’arrière de la chaussure, une cage en caoutchouc, dont le motif géométrique s’inspire des arcades de la galerie Véro Dodat, adresse historique de la maison. Autant d’éléments patiemment assemblés à la main. Alors bien sûr, on garde la semelle rouge, gimmick stylistique incontournable de la maison, mais on change de registre, plus macadam que red carpet : celle-ci est reliefée façon gaufre, mais évoque également, comme en négatif, en creux, les spikes Louboutin. Son nom lui vient bien sûr de sa semelle dentelé, évocation de la mâchoire aux dents acérées du terrible prédateur des mers et reprend aussi, tout en l’exacerbant, le design des semelles de running des années 70.
Pour ce modèle, Christian Louboutin expliquera s’être inspiré des graphismes de jeu vidéo rétro, des dessins d’enfants, de leurs maladresses et proportions exagérées. C’est donc assez logiquement que, pour ce lancement et la communication autour de ce modèle qui résolument détonne dans l’histoire de la marque, Louboutin fait appel au graphiste Hey Reillypour imaginer une série de visuels, comme autant de collages numériques, mettant en scène la Loubishark. Graphiste, instagrameur, adepte des détournements et connu pour son univers pop et décalé, Hey Reilly n’en est d’ailleurs pas à sa première collaboration avec l’industrie de la mode, avec déjà plusieurs collaborations sur les collections prêt-à-porter homme de Fendi.
Plein soleil, au bord d’une piscine, se faufilant au beau milieu d’un champ de lavande, arpentant les dunes de sel, sur un catwalk rose Lacroix, ou se frayant entre les sculptures de Miró et Giacometti à la fondation Maeght, la femme Jacquemus se fait glamour mais jamais prise de tête. Hype et nature, simple et solaire, empreint d’optimisme, la mode, le vêtement, l’accessoire vus par Simon Porte Jacquemus a rapidement su convaincre toute une génération de clients. Chacun des défilés de la marque ayant été marqué par des pièces hyper fortes, des scénographies pensées pour les réseaux sociaux et des accessoires hyper instagrammables comme autant de codes pour parler du style de celui qui déclare : « Je m’appelle Simon, j’aime le bleu et le blanc, les rayures, les fruits, Marseille et les années 80. » Citons pêle-mêle, la version micro du sac Chiquito sur la collection automne-hiver 2019-20 à porter comme un bijou, la capeline géante en raphia de la collection printemps-été 2017, et bien sûr le fameux Bambino en 2019.
Pour ce dernier, un modèle de sac au format trapèze, volume type « baguette », avec son look qui puise clairement son inspiration et design du côté des années 50 et 60, c’est collection après collection, saison après saison, qu’il se décline dans d’infinies variations de taille et de coloris : cuir lisse et brillant, veau effet tie and dye, vachette tannage végétal, agneau, version lin et cuir, rose Barbie ou imprimé léopard, version souple en chèvre et raphia renommé Bambimou, aperçu dans la collection « Les sculptures » du printemps-été 2024 et vendu sur ce modèle qui divise le secteur de la mode, depuis un moment déjà, du « see now, buy now ».
Assurément le modèle maro emblématique de la marque, avec sa bandoulière amovible, son large rabat, son logo en lettres dorées, est devenu le compagnon « facile à vivre », le « best-friend » des filles Jacquemus. Pour l’automne-hiver 2020-21, Laëtitia Casta ouvre le défilé de la collection et porte nonchalamment un Bambino. Repensé dans un porté version crossbody, ou volume XXL, weekender ou sac de sport, tout souple en toile et cuir, pour le Bambino de Voyage, autant de variantes qui intègrent les placards des garçons en Jacquemus.
La communication de la marque étant une affaire décidément rondement menée, la griffe multiplie les événements et coups d’éclat autour de son it-bag. Ainsi en 2023, Jacquemus investit les vitrines et les rayons des Galeries Lafayette, avec plusieurs pop-up stores à la scénographie détonante : dans l’un d’entre eux, il nous est proposé ni plus ni moins de littéralement pénétrer à l’intérieur d’une version géante du Bambino pour y découvrir la collection maroquinerie. Puis la même année, c’est la mise en ligne sur les réseaux sociaux d’une vidéo, à Paris, place de l’Opéra, on y voit circuler non pas les bus de la RATP, mais des versions géantes et colorées du Bambino. Cette campagne de communication, réalisée en animation 3D, plus vraie que nature et qui affole les compteurs avec plus de 19 millions de vues et des centaines de milliers de likes sur Instagram et autres fils d’actualités de la marque. Fin 2023, l’heure des bilans, et selon les analyses du site de vente en ligne de vêtements et accessoires de seconde main Vinted, le Bambino est le modèle le plus liké et recherché de l’année, détrônant au passage les géants du luxe tels que Chanel, Dior ou Louis Vuitton.
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Rédaction Florent Paudeleux
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