Des héritiers d’une noble lignée
Ainsi, en parfumerie, il y aura bien un « avant » et un « après » Cuir de Russie par Chanel. « Le parfum sera suivi de Scandal de Lanvin (1933) ou Cuir de Lancôme (1939). Les cuirs sont alors l’apparat des dandys et de l’élite artistique et intellectuelle de l’entre-deux guerres », confirme Yohan Cervi pour BDK Parfums. « En 1944, Robert Piguet évoque l’aura dramatique du film noir Hollywoodien avec Bandit, une création surdosée en isobutyl quinoléine, aux relents de goudron et de végétal écrasé. Dans les années 1950 et 1960, les chypres-cuirs tels que Doblis d’Hermès, Jolie Madame de Balmain ou Diorling de Christian Dior, marient les notes florales (violette, jasmin, rose) aux accents plus sombres du cuir, du patchouli et de la mousse de chêne, pour une féminité élégante, puissante et racée. Dans les années 1970 et 1980, la note cuir se cantonne quasi exclusivement au registre masculin, mêlée à des notes aromatiques et boisées puissantes, exprimant une virilité exacerbée, comme dans Antaeus de Chanel, Kouros d’Yves Saint Laurent, Jules de Christian Dior, ou Bel Ami d’Hermès. Puis les cuirs tomberont en désuétude pendant plus de dix ans, avant de renaître peu à peu, au début du XXIe siècle, au sein de la parfumerie confidentielle, dite de niche, alors en plein essor. » Le genre se popularise ensuite et les parfumeurs explorent alors de nouvelles matières et des accords inédits. « Aujourd’hui, les cuirs se font tantôt daim, tendres et ronds (Cuir Beluga de Guerlain, Cuir d’Ange d’Hermès), fruités (Tuscan Leather de Tom Ford) ou très bruts et fumés (Bois d’Ascèse de Naomi Goodsir), voire « oudés » (Leather Oud de Christian Dior), » conclut Yohan Cervi. Les cuirs n’ont pas fini de troubler les sens …