Des nouvelles pratiques agricoles aux conséquences notables sur les matières premières
Le deuxième débat de la journée visait à évaluer les incidences déjà perceptibles des changements d’approches agricoles sur les matières premières naturelles et le cuir en particulier. Cinq protagonistes se partageaient la parole pour nous faire profiter de leur compétence. En tant que Secrétaire Exécutif de l’initiative internationale « 4p1000 » – lancée par la France lors de la COP 21 en décembre 2015 – dont l’objectif est de « montrer que l’agriculture, et en particulier les sols agricoles, peuvent jouer un rôle crucial pour la sécurité alimentaire et le changement climatique », Paul Luu ouvrait la séance par une présentation aussi éclairante qu’encourageante du sujet. Responsable de 25% des émissions – directes et indirectes – de gaz à effet de serre, « l’agriculture pratiquée aujourd’hui se doit de devenir plus vertueuse en diminuant ses émissions bien sûr, et en réduisant son utilisation d’engrais, de pesticides et de produits phytosanitaires tout en continuant à assurer la sécurité alimentaire des populations. Mais elle peut aussi participer à la lutte contre le dérèglement climatique par de nouvelles approches comme l’agroécologie, l’agroforesterie, l’agriculture de conservation ou la gestion des paysages, déclarait l’agronome. En favorisant la captation du carbone dans le sol, elle peut diminuer la présence de celui-ci dans l’atmosphère tout en augmentant la résistance des sols à l’érosion et en les rendant plus fertiles ». Une augmentation annuelle de 0,4% (4 pour 1000, d’où le nom de l’initiative) du taux de carbone séquestré dans les sols peut diminuer considérablement la présence de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Responsable du projet Carbone et Biodiversité de l’Institut de l’Élevage (IDELE), Josselin Andurand témoignait de la volonté des éleveurs français de baisser leurs émissions anthropiques et diffuses. « Nous passons dans les fermes pour quantifier les émissions et mettre en place des mesures pour les diminuer. Nous évaluons aussi la biodiversité des élevages et les conseillons pour son amélioration. Le label Bas Carbone récompense les exploitations ayant adopté des méthodes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre ou séquestrer du carbone. » Outre-Atlantique, Megan Meiklejohn, Vice-Présidente de Land to Market™, s’emploie à « concevoir des chaînes d’approvisionnement depuis la ferme pour aider des marques à sourcer des fibres naturelles favorisant le fonctionnement des écosystèmes et les communautés locales ». Elle a rappelé que l’animal ne devait pas être considéré comme un ennemi ainsi que le rôle majeur des ruminants dans la gestion des prairies. Elle a également décrit l’outil scientifique EOV (Ecological Outcome Vertification) développé par Land to Market™ pour mesurer quatre impacts environnementaux liés à l’élevage. Elle a aussi insisté pour que les marques s’impliquent davantage auprès des agriculteurs et s’engagent sur des quantités d’achat. Comme la griffe UGG qui, avec l’aide de Land to Market™, a élaboré un projet sur cinq ans de soutien à l’agriculture régénérative sous forme de bourse pour former et accompagner les éleveurs. Aurélie Truffat, Responsable du pôle Marketing et Communication chez Demeter, a rappelé l’engagement de cet organisme de certification pour la biodynamie et ses effets sur la qualité alimentaire, cosmétique et textile. Sa certification est un gage de bonnes pratiques très apprécié des consommateurs et reconnu, dans le domaine textile, par l’éco-organisme Refashion pour la promotion de la circularité. Pour le printemps été 2023, la griffe de luxe Chloé a lancé son projet Vertical Digital ID pour une traçabilité complète des produits de prêt-à-porter comme de maroquinerie et chaussures. Une capsule a été intégrée à la collection, dont chaque produit possédait un passeport digital retraçant le parcours de sa fabrication, depuis la ferme à l’origine de sa matière jusqu’à son atelier de confection. D’ici 2025, tous les produits comporteront un identifiant numérique, permettant ainsi un shopping responsable et éclairé. « Depuis 2020, notre stratégie de sourcing est entièrement basée sur l’impact sur l’environnement, affirmait Christophe Bocquet, le Directeur Qualité, Conformité, SAV et RSE de la marque. Pour l’automne-hiver 2023-24, plus de 60% des matières premières utilisées sont à impact réduit ». Un exemple de transparence édifiant qui montre bien l’importance de pratiques agricoles durables pour la consommation.
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