Shoe Shoe séduit par son design audacieux et son engagement durable transparent

Shoe Shoe bottine cuir noir
Mixte, la bottine Shoe Shoe est réalisée dans deux coloris et trois finitions. - Photo © Matthieu Lavanchy.

Repérée dans la sélection Impact du salon Who’s Next dédiée à la création écoresponsable en janvier 2022 puis sélectionnée avec les Emerging Designers sur le Micam à Milan en septembre dernier, Shoe Shoe, la jeune marque fondée il y a un peu plus d’an par Élodie Verdan, s’est fixée une feuille de route exigeante. Alliant une recherche formelle rigoureuse, s’appuyant sur des savoir-faire rares habituellement réservés au luxe et une démarche écoresponsable inflexible, la créatrice a su séduire avec une proposition mono-produit de grande qualité à un prix juste.

Créer une chaussure forte, stable et équilibrée

Élodie Verdan est partie d’un constat personnel, relayé par de nombreuses femmes : les souliers féminins sont pensés pour être beaux mais rarement confortables. À l’étroit, compressés dans des chaussures fines qui perdent rapidement leur forme, les pieds des femmes ne bénéficient pas du même traitement que ceux des hommes. « J’ai voulu adresser ce problème en pensant une chaussure à la fois esthétique et confortable », confie la jeune femme. Cette chaussure, elle l’a voulue forte, stable et équilibrée. « Une chaussure pour marcher sans entraves », résume-t-elle. La force de la ligne est bien rendue par ce choix d’une forme emboîtante, au bout carré adouci et au talon cubique de 4,5 cm légèrement décalé. Les lignes de surpiqûres contrastées s’étirant jusqu’au talon soulignent la silhouette.
En faisant le choix de dessiner un modèle mixte – la chaussure taille jusqu’au 43 et est aussi portée par des hommes -, Élodie Verdan a aussi souhaité sortir des représentations stéréotypées associant féminité forte et stilettos à bouts pointus. Elle a opté pour un choix plus doux et adopté les codes de la botterie homme avec un montage cousu assez rare pour des souliers féminins, dont la semelle est souvent collée. Une technique issue d’un véritable savoir-faire bottier qu’elle souhaite valoriser dans le cadre de sa démarche durable.

Élodie Verdan créatrice marque Shoe Shoe
Élodie Verdan créatrice de la marque Shoe Shoe - Photo © Nyima Marin.

Un stylisme exigeant mettant en valeur des savoir-faire bottiers traditionnels

Après huit années passées en tant que styliste maille et jersey homme chez Louis Vuitton sous la direction de Kim Jones puis de Virgil Abloh, elle a eu envie de réaliser son projet personnel. Lassée par le rythme effréné des collections de prêt-à-porter, elle désirait créer un produit unique à l’impact environnemental minimal. Pour se familiariser avec les savoir-faire bottiers et élaborer sa boot idéale, Élodie Verdan a réalisé six mois de stage au sein d’ateliers près de Cholet. Dans une usine de formes, elle a développé son premier exemplaire d’une bottine à la semelle rondement carrée et au cousu sandalette qui serviront de base à son modèle définitif. La réalisation du talon gainé de cuir, avec ses coutures ouvertes dessinant un rappel de l’empeigne et de la tige, s’est révélée être un vrai challenge nécessitant une multitude de maquettes. Il fallait aussi trouver le bon décroché pour s’harmoniser avec la ligne du devant. En associant à la couture sandalette de sa semelle cuir, un cousu Blake, Élodie Verdan mixe les codes du soulier homme classique et des chaussures techniques, apportant souplesse, robustesse et esthétique mixte à son soulier. Ces finitions complexes sont en général l’apanage des souliers de luxe faits main. Avec sa proposition au prix de 450 euros, elle se propose de démocratiser la belle façon. Une démarche qui se poursuit dans le choix des matières utilisées et des partenaires retenus pour la production.

Une fabrication en petite série issue de stocks dormants certifiés LWG et REACH

Le choix d’utiliser des cuirs de stocks dormants était un prérequis indispensable pour la jeune femme. Cette démarche permet en effet une économie non négligeable de ressources productives en eau et CO2, en phase avec les convictions de la créatrice. Les peaux retenues sont totalement traçables et répondent à des exigences environnementales élevées. Elle s’est tournée vers des peaux certifiées Leather Working Group et REACH. Une sélection qui comprend des cuirs de veau légèrement foulonnés provenant de stocks dormants de chez Rino Mastrotto ou d’autres dénichés grâce à Adapta Paris. Le talon, la première de montage et le bout dur proviennent de fournisseurs proches du fabricant italien. La première production d’une centaine de paires a en effet été réalisée dans un atelier toscan reconnu pour l’excellence de son travail.
Elle revient sur cette expérience de lancement de collection et pointe les difficultés rencontrées sur un tel projet. Tout d’abord la complexité de trouver un partenaire acceptant de s’engager sur une petite production. Mettre au point des machines pour peu de paires est rarement rentable et il faut croire en la pérennité d’un projet et s’engager à plus long terme. Par ailleurs, travailler avec des stocks dormants, c’est aussi se confronter à la possibilité de manquer de matière première pour atteindre les minimums du fabricant. La question de la maîtrise des coûts sans accorder aucun compromis à la complexité et la qualité du produit est aussi au centre de sa réflexion dans la poursuite de son projet et va de pair avec celle de la distribution.

Au-delà du lancement participatif, pérenniser la marque avec de nouveaux partenaires

En créant son soulier, Élodie Verdan prévoyait d’atteindre un prix de vente maximum de 350 euros. La bottine est finalement vendue en boutique à 450 euros et c’est avec la plus grande transparence que la créatrice a souhaité communiquer auprès des clients finaux sur la composition de son prix à l’occasion du crowdfunding qui lui a permis de lancer sa première production.
90% des coûts sont liés à la matière première, à la main-d’œuvre et à la production, le reste est composé du packaging et de la logistique, aucun budget n’étant investi en publicité et communication. Une marge modeste de 2,3 a finalement été appliquée, englobant celle de la marque et du distributeur, car si le premier modèle a été lancé en direct par financement participatif, Élodie Verdan a intégré une stratégie de revendeur dès l’origine du projet, la campagne Ulule étant d’ailleurs parrainée par le salon Who’s Next. Le magasin Centre Commercial distribue d’ores et déjà la bottine dans ses deux déclinaisons, noire et crème. Deux nouveaux modèles dérivés de la bottine – une sandale et un mocassin haut au décolleté carré – ont été mis au point. Pour leur production ainsi que celle de la bottine, Élodie Verdan s’est tournée vers un nouveau fabricant italien situé dans la région des Marches. Une nouvelle coopération qui lui permettra d’augmenter prudemment sa production tout en bénéficiant des cuirs d’une tannerie partenaire certifiée lui garantissant un approvisionnement stable et des marges plus équilibrées.

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Rédaction Hélène Borderie

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