Caroline Krug (Pechdo) : « Nos clients EPI nous poussent à anticiper la réglementation RSE »

Pechdo intègre à 100% sa production, soit environ 25 étapes, dans son atelier aveyronnais - Photo © Philémon d’Andurain.

Ex LVMH, Caroline Krug, la présidente de Pechdo, a repris l’entreprise il y a sept ans. Elle nous éclaire sur les raisons de l’engagement RSE très avancé de cette tannerie aveyronnaise, spécialiste des cuirs techniques pour les EPI. Elle emploie une quarantaine de salariés, dont plus de 30 en production.

Caroline Krug, dirigeante de Pechdo : « La qualité de nos produits est notre premier gage de durabilité » - Photo © ViaTaraPhoto.

Comment vous êtes-vous montrés pro-actifs par rapport à la réglementation RSE ?

La qualité de nos produits est notre premier gage de durabilité.  Mais le point le plus important pour la RSE et la traçabilité de Pechdo est notre production 100% intégrée, de la peau brute (100% française) à la peau finie. Cela représente environ 25 étapes, dont la toute première, la rivière (transformation des peaux brutes en wet blue – NDLR). Gourmande en coûts (hommes, eau et énergie), celle-ci est désormais délaissée par beaucoup de tanneurs qui achètent des peaux déjà préparées. Elle est pour moi essentielle au même titre que la fermentation d’un raisin pour la fabrication d’un champagne. Cette maîtrise nous permet d’anticiper une réglementation RSE en mutation permanente. Cela apporte une connaissance fabuleuse à nos équipes pour trouver de nouvelles solutions et améliorer nos processus. Seul fabricant européen de cuirs techniques, Pechdo vend à 80% aux marchés administratifs (pompiers, police, armée, industrie…) et sport, dont 60% à l’export. Très poussé en termes d’ingénieurs, laboratoires de recherche et tests, notre dispositif diffère ainsi de celui des autres tanneries.
Nos clients, les fabricants les plus qualitatifs au monde en termes d’EPI, nous soumettent un cahier des charges pour répondre à un appel d’offre. Il n’est pas question d’envoyer un échantillon ne répondant pas à 100% aux normes. On teste jusqu’à y parvenir, même s’il nous faut parfois renégocier les délais ! Nous pouvons ainsi mener jusqu’à 30 projets de R&D en parallèle.
Le caractère dynamique du marché des EPI, associé aux contraintes RSE, est ainsi impulsé par l’ultra exigence de nos clients. Et cela dans un contexte hyper concurrentiel, face aux fabricants d’Asie.  Nous sommes obligés de connaître ce qui va sortir deux ans plus tard et de nous positionner en permanence en termes d’innovation. Par exemple, on nous a demandé de retravailler le cuir pour des gants de pompiers afin de le rendre lavable, une étude américaine ayant démontré le caractère cancérigène des fumées d’incendie. Cela nous semblait impossible pour un gant en cuir anti-feu. Mais nous y sommes finalement parvenus, et avons lancé notre produit il y a 18 mois. 

En raison de sa spécialité EPI, Pechdo est doté d'un dispositif particulièrement poussé en matière de laboratoires de recherche et tests et d'ingénierie - Photo © Benoît Sanchez-Matéo.

Pensez-vous que la réglementation RSE puisse être un vecteur de dynamisme et non une contrainte pour vous ?

Si je la voyais seulement comme une contrainte, je n’aurais jamais repris Pechdo ! Nous faisons face en permanence à de nouvelles interdictions, notamment de produits dangereux. Et en termes d’exigences, nos clients EPI sont toujours en avance sur ceux de la mode et sur la réglementation. Nous avons ainsi mis en place un audit LWG (Leather Working Group) à leur demande depuis déjà cinq ans. Cela nous donne une colonne vertébrale en termes d’amélioration continue. Autre exemple, depuis deux ans, plusieurs clients nous imposent des cuirs sans substances fluorées PFAS, alors que le projet de restriction n’est pas encore clairement défini en Europe.
Et la pression s’accélère. Notre coût de gestion de l’environnement est passé de 4% du prix de revient moyen il y a cinq ans à 8,7% aujourd’hui.
Sur le plan humain, cela a aussi des conséquences : nous avons fait passer notre Responsable Qualité Sécurité et Environnement (QSE) de mi-temps à plein temps il y a deux ans.

Inscrivez-vous à la Newsleather pour recevoir nos articles selon vos préférences de thématiques.

Rédaction Sophie Bouhier de l’Ecluse

j'AIME
TWEETER
PIN IT
LINKEDIN

Consultez
les derniers articles
de la rubrique

Quitter la version mobile
Fermer