La liberté et la passion, l’alchimie du Festival de Hyères selon Jean-Pierre Blanc
Lorsqu’il initie en 1985 la première édition d’un festival de mode dans sa ville, Jean-Pierre Blanc fait un pari un peu fou, celui de promouvoir des ...
La cordonnerie est un métier artisanal qui traverse les siècles. L’essor de l’économie circulaire a remis en pleine lumière sa nature écologique. À la tête de la Fédération Française de la Cordonnerie Multiservice (FFCM), Jean-Pierre Verneau défend avec enthousiasme un métier de proximité qu’il exerce au Mans. C’est précisément dans sa boutique-atelier que l’artisan a accueilli les dernières Rencontres du Cuir autour des thèmes de la réparabilité et de la formation. En 2023, le soutien apporté à l’éco-organisme de la filière TLC Refashion s’intensifie et dessine les contours d’une « nouvelle cordonnerie » en marche.
Jean-Pierre Verneau est un artisan passionné comme il en existe tant. Ce fils de cordonnier a rapidement appris les bases de son métier au sein de l’atelier familial. En 1995, il rachète une entreprise de cordonnerie au Mans. Deux ans plus tard, il obtient son Brevet de maîtrise et devient Maître Artisan. « J’ai travaillé seul pendant vingt ans. J’ai eu ensuite un apprenti, devenu salarié. Pour moi, le développement de l’entreprise passe par la transmission ». Jean-Pierre Verneau rappelle la profonde transformation de son métier. « Les cordonniers bottiers de l’après-guerre fabriquaient eux-mêmes les souliers. On peut parler d’âge d’or ! La mode était aux petits talons. Le Mans comptait 200 cordonniers. Nous sommes aujourd’hui une petite quinzaine. Lorsque les importations de chaussures ont pris le pas à partir des années 1980, les cordonniers ont fermé en masse. Les autres ont introduit le multiservice. La reproduction de clés, la vente de chaussures, les travaux d’imprimerie et de gravure, la patine sur cuir composent le « couteau suisse » de la cordonnerie multiservice. La cordonnerie pure n’est plus viable. Nous sommes des commerces de proximité et nous répondons aux besoins divers de nos clients. »
La cordonnerie Verneau est l’exemple même de cette adaptabilité à l’évolution des usages. « Pendant les travaux de construction du tramway, précise l’artisan, nous avons été agréés réparateurs Paraboot. Cela nous a sauvés. C’était une véritable opportunité car nous avons développé le haut de gamme ». Bien lui en a pris ! Sa cordonnerie est connue aussi pour ses réparations des chaussures Heschung et ses transformations avec les semelles Vibram®. La façade est celle d’une cordonnerie traditionnelle. Un choix riche de sens pour ce commerçant de « terrain », investi au quotidien afin de valoriser la réparation dans toute sa diversité. « Plus on tarde à réparer, plus on s’approche de l’opération de sauvetage ! », dit-il. Dès le seuil, les produits spécialisés – nécessaires au confort, à l’entretien – sont en vente, bien en vue : semelles, cirages, brosses de nettoyage (de marques françaises majoritairement) ainsi qu’un panneau entier proposant les semelles Vibram®. « La couleur attire spontanément l’oeil et plaît beaucoup. La customisation des semelles représente un vrai débouché. » L’atelier est suffisamment grand pour regrouper plusieurs machines techniques, notamment des presses. « C’est un investissement indispensable si l’on veut réparer des sneakers, poursuit-il. La basket est un produit incontournable qui chausse le consommateur, toutes générations confondues. On nous apporte aussi de plus en plus de chaussures de randonnée à ressemeler. » L’atelier dispose par ailleurs d’un banc de finissage « pour le bichonnage » des souliers et d’un petit espace dédié à la maroquinerie. « Les réparateurs en maroquinerie sont rares, explique Jean-Pierre Verneau. Le cordonnier peut effectuer divers travaux comme raccourcir une ceinture, changer une attache, un zip… Ces réparations spécifiques représentent environ 20% de mon activité. » Au fond, des cuirs de toutes les couleurs dépassent de plusieurs caisses. « Je conserve les chutes depuis 28 ans !, ajoute-il. Elles sont très utiles pour réaliser des lanières, des pièces intérieures… Les premières de propreté, par exemple, sont découpées dans les plus grandes peaux. Les cuirs actuels sont presque tous rectifiés. Lorsque je sors de mes réserves du cuir à tannage végétal, cela m’offre l’occasion d’informer le consommateur sur sa valeur ajoutée. »
Depuis 2017, le cordonnier du Mans a pris les rênes de la FFCM avec une ambition : dépoussiérer son image et la redynamiser grâce à des synergies porteuses. L’organisation a ainsi intégré en 2020 le Conseil National du Cuir (CNC) et noué un partenariat, en décembre dernier, avec la start-up digitale Fingz, qui met en relation consommateurs et artisans réparateurs, répartis sur le territoire. Elle est aussi partie prenante du dispositif Repar’Acteurs, déployé par les Chambres des métiers et de l’artisanat avec l’ADEME. À l’occasion des 14èmes Rencontres du Cuir, organisées par le Conseil National du Cuir, Jean-Pierre Verneau a souligné l’importance de l’économie circulaire. « L’essence même de notre métier est d’entretenir, de réparer, de prolonger. On a évolué et on peut tout réparer. Le cordonnier est un maillon essentiel de la chaine environnementale. Il fait partie d’un système vertueux. » La présidente de la Fédération Française de la Chaussure (FFC), Clémentine Colin Richard, conforte ses propos. « Je crois à la boucle ouverte. À mon arrivée à la FFC, j’ai souhaité regrouper les acteurs de la chaussure. Les fabricants fabriquent mais n’ont pas vocation, à l’origine, à réparer. Les cordonniers jouent un rôle majeur. Nous devons adapter la collecte des chaussures usagées, intégrer les cordonniers, les distributeurs, les succursalistes… La R&D va nous aider à réinventer la chaussure. » L’administratrice de la marque Paraboot est impliquée dans Refashion. La FFCM, qui a soutenu sa campagne de communication #RRRR 2022, renforce son engagement en 2023. « Refashion part de zéro avec la chaussure. Nous allons apporter notre soutien technique. Le groupe de travail auquel participe la FFCM devra déterminer comment, quand, avec quoi réparer. Nous allons aussi nous pencher sur les barèmes de dédommagement proposés au consommateur et une possible labellisation. C’est une vraie chance pour renforcer et moderniser notre métier. »
À l’issue des Rencontres du Cuir à la cordonnerie Verneau, le président de la Filière Française du Cuir Frank Boehly synthétisait ainsi l’évolution du métier. « Le cordonnier intervient en bout de chaine pour prolonger la durée de vie du produit et il est un acteur majeur de l’éco responsabilité de la filière cuir. Son métier est à tort mal connu. Aujourd’hui, il fait écho à l’envie de moins consommer et retrouve tout son sens ». Les effectifs (3500 entreprises) se sont stabilisés. « Les CDI sont majoritaires et la profession s’est féminisée, précise Jean-Pierre Verneau. Pour autant, les problèmes de recrutement sont réels. D’ici à cinq ans, 500 entreprises seront à reprendre. La reconversion constitue un vivier. Les jeunes ne nous connaissent pas encore suffisamment ». Côté formation, les deux CAP (Cordonnerie Multiservice, Cordonnier Bottier) se préparent en deux ans ainsi que le Brevet Technique des Métiers (BTM), dispensé au Campus des Métiers et de l’Artisanat à Joué-Lès-Tours. « Entre vingt et trente apprenants sont formés chaque année ». Les adultes, quant à eux, peuvent se former, qu’ils soient demandeurs d’emploi, désireux de se perfectionner ou de reprendre une entreprise. Ce qu’il observe autour de lui donne confiance au représentant national de la cordonnerie. « La jeune génération apporte du renouveau et un vrai dynamisme. De jeunes artisans s’engagent dans la création ou la reprise d’entreprises. La plupart d’entre eux sont autodidactes. Ils sont sensibles à l’accueil, au service, à la qualité du commerce de proximité et font du décor un cadre plus « cosy ». La cordonnerie est inventive. Elle est capable de diversifier ses services sans dénaturer sa pratique. Le multiservice l’a prouvé. La spécialisation permet aussi de se différencier. Les sneakers, les chaussures de montagne, la customisation n’ouvrent pas seulement des débouchés. Ils attirent de plus en plus les jeunes. »
Inscrivez-vous à la Newsleather pour recevoir nos articles à votre rythme et selon vos préférences de thématiques.
Rédaction Nadine Guérin
Lorsqu’il initie en 1985 la première édition d’un festival de mode dans sa ville, Jean-Pierre Blanc fait un pari un peu fou, celui de promouvoir des ...
Co-créée avec Florian Amiand, Recycuir collecte et valorise les chutes de cuir issues de la maroquinerie française en les transformant en une nouvelle ...
Promouvoir la circularité dans le luxe à travers la revente, la restauration, l’upcycling, tel est l’objectif de ce rendez-vous parisien, exclusif et ...