La botte camarguaise, labellisée après la charentaise
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À l’aune du renouveau de la filière cuir du bassin graulhetois, des mégisseries ont mutualisé leurs ressources pour l’embauche d’une responsable QHSE dédiée à la réussite de la certification. Rencontre avec Elisa Fournac qui a entamé sa collaboration avec les mégisseries La Molière, Rial 1957 et Mégisserie du Midi.
Les entreprises m’ont appris l’aspect technique du cuir, et je leur ai apporté la méthodologie que je maîtrisais car le protocole reprend à 80% les normes ISO 14001courantes auxquelles j’ai été formée lors de mon Master QHSE (Qualité, Hygiène, Sécurité, Environnement) à Albi. Tandis que les normes habituelles vont reposer sur des concepts vastes tels que l’élaboration, la mise en œuvre, la maintenance et l’évaluation d’un Système de Management Environnemental (SME), le protocole de Leather Working Group (LWG) est très précis avec, par exemple, la traçabilité des achats identifiant fermes et abattoirs.
Les salariés en voient les avantages. C’est un grand changement, il y a un avant et un après LWG. Les entreprises sont beaucoup mieux organisées, avec une meilleure qualité de travail pour les salariés. Il est arrivé que d’anciens salariés à la retraite repassent, impressionnés du changement : « Waouh, j’aurais bien aimé que ce soit comme ça à mon époque ! »
Souvent, je constate que tout le monde appréhende les auditeurs dont le métier reste méconnu. Le travail de l’audit n’est pas celui de l’inspection du travail. Son rôle est de conseiller dans un but d’amélioration des process à partir d’un état des lieux de l’entreprise réalisé à l’instant T. Ce qui a été mis en place a pour but de perdurer avec un renouvellement de la certification tous les deux ans. Vis-à-vis des clients, la certification LWG est un gage d’un travail de grande qualité avec, par exemple, une meilleure maîtrise et un meilleur suivi des produits utilisés dans les cuirs, et par la réalisation de tests plus réguliers sur les peaux aussi. Avoir un point de vue extérieur sur l’entreprise est très instructif.
Ce protocole de certification exige motivation et implication. La direction doit montrer son engagement auprès de ses salariés qui doivent aussi être impliqués. Au premier abord, les salariés comme les dirigeants ne sont pas forcément emballés par le travail à réaliser car cela exige d’y consacrer du temps. Ce qui est d’autant plus compliqué pour de petites entreprises où les dirigeants sont à la production comme les salariés, avec un manque de temps, et surtout l’absence de compétences sur le sujet (outils méthodologiques QHSE, procédures…). Ce qui reste difficile, c’est le changement des habitudes de travail. Par exemple, la mise en place du marquage au sol en zones dédiées – au travail en cours, à l’expédition, aux piétons – a défié les habitudes. Au début, les salariés ou les dirigeants ont un peu râlé avant, finalement, de se rendre compte, à la clé, du travail facilité et plus sécurisé. Nous avons amené de la rigueur.
J’ai commencé par m’immerger dans le domaine d’activité qui m’était inconnu en mettant à jour les fiches de poste des salariés, à la suite de petites interviews et l’observation du travail à l’œuvre. Puis, on a répondu à tous les points rencontrés sur chacun des chapitres : consommation d’eau, traçabilité, produits chimiques, déchets, système de management environnemental, santé et sécurité des salariés dans l’entreprise, etc. LWG, c’est formuler par écrit beaucoup de données que les salariés gardent en tête. LWG amène beaucoup de rigueur.
Le temps consacré au recueil dans le détail des données de production est long. Hormis la facturation, les entreprises n’ont pas forcément de tableaux de suivi où récupérer toutes les données de production et de consommation d’énergie par exemple.
En travaillant une semaine chez chacun, je repère aussi des bonnes pratiques améliorant le confort et la sécurité des salariés potentiellement intéressantes pour d’autres confrontés à une même problématique. Par exemple, une judicieuse gestion des bacs de rétention obligatoires pour les produits chimiques pour éviter le déversement en cas de fuite. Ou le recours à un prestataire qui rachète les bidons de produits chimiques vides pour un réemploi, et non une destruction. De bonnes pratiques qu’on essaie de mettre en place. Sur le volet social, par exemple, une formation pour quelques salariés de cinq entreprises a permis une remise à jour consacrée à l’évolution de la réglementation quant aux risques liés aux produits chimiques. Cela favorise aussi la communication entre les entreprises.
Les affichages sont beaucoup plus formalisés : marquage au sol, étiquetage pour la gestion des déchets et produits chimiques, mise en place des sensibilisations internes au port des EPI (équipement de protection individuelle), à l’environnement, fiches de postes. Des livrets d’accueil pour l’arrivée des nouveaux salariés ont aussi été mis en place.
Le protocole est en constante évolution : en 2021, un audit social optionnel est apparu dans le protocole. Une façon de permettre de travailler sur un sujet en amont avant qu’il ne devienne obligatoire. L’auditeur nous a mentionné la demande croissante pour les audits sociaux dans les domaines du textile, cuir et vêtement à la suite des conditions de travail décriées dans les usines au Bangladesh, notamment. C’est un sujet qui devient de plus en plus important pour nos clients.
Même si la norme LWG est la même pour tous, les différents chapitres abordent la réglementation nationale, plus ou moins stricte selon les pays. Cela dit, il a tout de même la rigueur du LWG. Par exemple sont exigées des valeurs chiffrées à respecter et des tests mesurant la qualité des eaux usées traitées. Si cela n’est pas inclus dans la réglementation du pays et que l’entreprise ne fait pas ce suivi, l’audit échouera. En ce sens, les exigences du protocole LWG peuvent être supérieures à la réglementation d’un pays.
Je pense que les entreprises auraient avancé dans le sens du LWG, mais plus lentement, peut-être pas aussi loin. La réglementation évolue, les demandes des clients sont toujours plus exigeantes et l’impact environnemental des entreprises en général est important. C’est pourquoi nous devons travailler à améliorer notre quotidien pour garder de bonnes conditions de travail et la pérennisation des entreprises. La certification témoigne d’une réelle volonté de ceux qui persistent à garder le cap, s’améliorer, grandir, et pérenniser l’activité en recrutant des jeunes. Qu’on puisse les former avant les départs à la retraite, là réside aussi l’intérêt de l’aspect formalisation du LGW permettant de préserver une trace du savoir-faire et des compétences de chacun. Il y a une réelle envie d’aller de l’avant.
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Rédaction Stéphanie Bui
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