La Rue du Made in France, vitrine du savoir-faire français à Paris
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La nouvelle étude co-réalisée par Bain & Company et le Comité Colbert se penche sur la boutique du futur dans le secteur du luxe. Outre des informations sur le degré d’acceptation des nouvelles technologies par les clients français, chinois et américains, elle donne des cas d’usage, exemples à l’appui, notamment dans le secteur du cuir. Comment bâtir la boutique du futur en tirant partie des meilleures technologies, qui soient acceptées, voire plébiscitées par les consommateurs ?
Alors que les clients du luxe sont revenus en force dans les points de vente physiques en cette période post-pandémie, le cabinet d’études Bain & Company et le Comité Colbert, l’association qui rallie 93 maisons de luxe françaises, ont jugé la question pertinente. Ils en ont fait leur sujet d’étude en 2023, dont les enseignements ont été récemment révélés. Et ce, un an après leur rapport “Luxe et Technologie”, qui balayait le rapport entretenu par cet univers avec les nouvelles technologies de façon générale.
Réalisé entre avril et juin 2023, ce nouvel opus zoome sur la boutique du futur mais élargit la focale d’observation géographique. Il combine plusieurs sources : un questionnaire en ligne qualitatif auprès de clients du luxe en France, Chine et aux États-Unis, des entretiens qualitatifs avec ces derniers et des dirigeants de maisons, groupes et partenaires technologiques, le tout complété par des recherches documentaires.
Parmi les sociétés s’étant prêtées au jeu, une dizaine évolue dans le secteur du cuir (maroquinerie, chaussures…), soit environ la moitié des maisons mobilisées pour l’étude.
L’étude se penche ainsi sur trois grandes thématiques, que les nouvelles technologies sont susceptibles de transformer de façon positive dans le point de vente de demain : les interactions entre client et vendeur, l’enrichissement du parcours client et la découverte de la marque, et enfin la fluidité du parcours et des opérations.
Onze cas d’usage ont été testés. Pour les relations vendeurs-clients, il s’agissait de l’assistance par un robot et de l’obtention de recommandations personnalisées sur iPad. Pour l’enrichissement du parcours client, l’étude s’est penchée sur l’accès aux informations produits via une étiquette numérique ou Digital Tag ; sur la personnalisation des produits par le client ; la découverte de l’histoire de la marque via du contenu numérique ; l’essai virtuel des produits et l’authentification-estimation d’un produit sur une machine avant sa revente. Enfin, en matière de fluidité, ont été étudiés la préparation d’une wishlist en ligne ; le paiement rapide « de n’importe où dans la boutique » via un terminal de paiement mobile ou Tap to Pay ; l’identification de sa taille via un scanner corporel 3D et la prise de rendez-vous en ligne.
Premier constat et non des moindres : « Les clients du luxe plébiscitent les technologies. Sur les onze citées, dix ont un taux d’acceptation supérieur à 70% », indique Mathilde Haemmerlé, Associée en charge du Pôle Luxe chez Bain & Company Paris, co-auteure de l’étude avec Charlotte Morizot, Senior Manager Distribution et Luxe dans le même cabinet. Mais si toutes les générations partagent un intérêt fort pour les technologies, les taux d’acceptation diffèrent d’une nationalité à l’autre : les Français sont 66% à les apprécier contre 74% des Américains et 84% des Chinois ! L’Empire du Milieu est justement un terrain privilégié pour tester les innovations dernier-cri des maisons. En revanche, pour tous les sondés, ces technologies doivent répondre à un impératif : ne pas être déconnectées de l’humain. Le vendeur doit rester l’interlocuteur n°1. Pas étonnant si l’outil recueillant le moins bon score d’acceptation (63% des répondants) est « l’assistance robotisée ». La nécessité d’enrichir la relation avec le vendeur, et non de se substituer à lui, fait partie des règles d’or que l’étude de Bain & Cie x Comité Colbert dégage pour un bon usage des technologies en magasin. Elle recommande aussi généralement la discrétion. La technologie ne doit pas « constituer une distraction à l’intérieur du parcours client » et « l’émotion additionnelle qu’elle procure doit se faire par petites touches ou être intégrée dans des espaces dédiés ». Et de citer un exemple respectant ce dernier conseil : le distributeur automatique de sacs de Jacquemus, cantonné sur une superficie ad hoc.
Pour autant, il arrive que certaines technologies comme les étiquettes digitales, jusqu’alors à usage interne (notamment logistique) et invisibles pour le client, sortent de leur réserve. C’est le cas de ces puces NFC intégrées dans les produits, amenées à « prolonger la relation entre le vendeur et son client », le premier pouvant suggérer, via leur entremise, entretien, réparation ou autre service au client. Grâce à une solution développée par Aura et la start-up Selinko, le spécialiste des valises Rimowa (groupe LVMH) propose ainsi à ses clients d’enregistrer leur produit et de télécharger un certificat d’authenticité et de propriété enregistré sur la blockchain.
La Maison Chloé (groupe Richemont) a aussi déployé un tel outil. La Digital ID, lancée en avril 2023 en partenariat avec EON et Trust-Place, est un QR code (ou une puce pour les chaussures) apposé sur sa collection Chloé Vertical (sacs, chaussures, prêt-à-porter). Objectif : une traçabilité intégrale. Ce passeport digital permet d’accéder à des informations sur le parcours de fabrication – du champ d’origine de la matière à la confection – mais aussi à des conseils d’entretien et de réparation. Un lien direct facilite aussi la revente authentifiée sur la plateforme de seconde main Vestiaire Collective.
Autre technologie pertinente déployée par Chloé, mais à une autre finalité, la formation de ses équipes de vente : l’application native Chloé Academy. Initialement conçue pour seconder les vendeurs sur les lancements de nouveaux produits, celle-ci a élargi son périmètre. Elle accompagne désormais la stratégie client de la Maison au sens large, en distillant « des conseils pour encourager l’évolution comportementale » des vendeurs…
Dans la même optique, Longchamp a développé avec Chapsvision une application utilisée par 1 200 vendeurs dans 270 points de vente et 25 pays. Le concept est d’offrir une vue 360° du client reposant sur des données capturées tout au long de son parcours en boutique, en service client et bientôt en ligne, pour assurer des recommandations sur-mesure et améliorer l’expérience en boutique… Cette technologie « invisible rend nos vendeurs plus rapides, efficaces, intelligents et sachants, sans pour autant déshumaniser les interactions », se réjouit Séverine Darbois, Directrice de l’Expérience Client, Distribution et E-commerce chez le maroquinier.
Au-delà de tous ces cas exemplaires, les maisons de la filière cuir sont-elles dans l’ensemble plutôt en avance ou en retard en matière d’utilisation des nouvelles technologies dans le point de vente ?
« Les facteurs qui impactent le plus le degré de maturité des technologies sont l’appartenance à un groupe et la culture de la maison ou du groupe », répond Charlotte Morizot (Bain & Company). Si on regarde les cas d’usage, la catégorie accessoires/cuir est propice à certains d’entre eux. En ce qui concerne la localisation des produits au sein de la boutique et de la chaîne de fabrication et d’approvisionnement, la RFID se prête particulièrement bien à la maroquinerie. En revanche, cette dernière est moins avancée que la joaillerie et la beauté pour l’essayage virtuel ».
Enfin, quel que soit la spécialisation des maisons de luxe, l’étude Bain x Colbert souligne « qu’un déploiement à plus grande échelle » des nouvelles technologies par une maison de luxe « requiert leur transformation profonde, bien au-delà de la boutique ». Celle-ci « passera par une révolution culturelle (adhésion des équipes de vente, plateformes de travail), une refonte des architectures technologiques ainsi qu’une évolution de la boutique, dans son agencement et son organisation ».
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Rédaction Sophie Bouhier de l’Ecluse
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