À Angoulême, la FFVE et la filière cuir locale célèbrent le patrimoine automobile sur parchemin.
À l’occasion du Circuit des Remparts d’Angoulême, les lauréats du Concours d’État, organisé par la Fédération Française des Véhicules ...
Déjà sept ans qu’à la rentrée, la filière cuir tient ses assises du développement durable. Pourtant, chaque édition du Sustainable Leather Forum aborde des thèmes sinon nouveaux, du moins insuffisamment explorés au regard de leur importance et révèle des avancées majeures pour l’avenir du secteur comme celui de la planète. Et le public ne décroche pas avec, encore cette fois, 300 participants présents au rendez-vous. En complément des interventions et débats qui se tenaient dans l’amphithéâtre de la Maison de la Chimie ce lundi 8 septembre, un espace d’exposition permettait au public de rencontrer les professionnels d’une vingtaine de sociétés sélectionnées pour leur activité en lien avec la RSE, et d’assister, durant les temps de pause, à leurs présentations aussi claires qu’interactives. Retour sur la matinée.
Comme il se devait, les discours introductifs des responsables de l’Alliance France Cuir, commanditaire du forum auprès d’un comité d’organisation présidé par Yves Morin, inauguraient la journée. Le Président Christophe Dehard rappelait l’influence du climat sur la consommation et la production, dans un contexte de tensions entre les trois blocs que constituent maintenant la Chine, les États-Unis et l’Europe, où « les produits de luxe se vendent moins facilement ». Pour surmonter ces difficultés, il préconisait le développement durable appréhendé comme un atout, et plus particulièrement une gestion responsable de l’eau à laquelle était consacrée la matinée. Le Directeur Général Marc Brunel soulignait, quant à lui, la volonté de dialogue de la filière entre ses différents acteurs mais aussi avec d’autres secteurs, comme celui de l’automobile, et celle de sensibiliser toujours plus les nouvelles générations, les consommateurs de demain, à la durabilité et la réparabilité des articles en cuir, deuxième matière préférée des Français.
Pour ouvrir la thématique de l’eau à laquelle était dédiée la première demi-journée, les organisateurs avaient invité le Directeur du Centre d’Études et de Recherche sur la Mer de l’Institut Catholique de Paris, Christian Buchet. Ancien secrétaire général du Grenelle de la Mer et membre de l’Académie de Marine, celui-ci replaçait le sujet dans un large contexte où la mer, qui couvre 72% de la surface du globe, apparait comme une formidable opportunité pour l’avenir de l’humanité. Selon cet éminent spécialiste, auteur de plusieurs ouvrages, la mer possède non pas deux mais quatre dimensions : sa surface et sa profondeur (aussi appelée tranche d’eau) et également les terres immergées – qui sont toujours à 80% inconnues des hommes – et son sous-sol. Autant de potentiels de découvertes pour les scientifiques, porteuses de perspectives pour la science et de solutions pour s’adapter aux changements de la planète. Tout comme l’infiniment petit, qui pullule dans les océans : « On ne connaît aujourd’hui que 2 à 3% de la microbiologie marine. Le biomimétisme est assurément une voie de progrès pour l’homme », déclarait Christian Buchet. Tout en indiquant qu’aujourd’hui, 75% de la population mondiale se concentrent sur une bande littorale de 75 km de largeur, l’intervenant soulignait l’avantage de taille de la France qui, avec tous ses départements et territoires d’Outre-mer, se classe au deuxième rang mondial des domaines maritimes, derrière les États-Unis, mais largement devant la Chine classée à la dixième place. En conclusion, il insistait donc sur la nécessité pour la France d’avoir une politique maritime digne des enjeux auxquels elle doit faire face et pour lesquels l’océan pourrait s’avérer providentiel.
L’intervention de Payal Luthra sur la mode et la préservation de l’eau se rapprochait des préoccupations quotidiennes de l’auditoire. La responsable mondiale de l’habillement et textile au sein de WWF États-Unis débutait son allocution en avertissant sur une crise de l’eau douce déjà en marche. Ressource naturelle la plus exploitée mais pas assez respectée, elle ne représente que 2,5% des eaux de la planète et seulement 0,19% sont accessibles à l’homme. Les prélèvements trop importants et le changement climatique exposent déjà la moitié de la population mondiale au manque d’eau. La sécheresse mais aussi les inondations affectent également la biodiversité par la disparition corollaire de certaines espèces. « L’industrie de la mode est très impliquée dans l’exploitation de l’eau, lançait l’experte. Le besoin d’eau est présent à toutes les étapes de la chaîne de valeur du textile, particulièrement en amont, pour l’extraction des matières premières. » Une étude de WWF en 2022 a identifié des zones à forte densité de production où la crise de l’eau sera particulièrement forte si rien ne change dans le futur. L’Inde et le Pakistan seraient même plus impactés par la dégradation de la qualité de l’eau et les inondations que par le manque d’eau. « Pour les entreprises du secteur de la mode, les risques sont certes physiques avec les conséquences de la sécheresse ou des inondations ; mais ils sont aussi financiers lorsqu’elles ne respectent pas les réglementations, ou réputationnels, exposait Payal Luthra. WWF a mis au point un outil à destination des entreprises pour pointer les risques et entamer un plan d’action. La gestion responsable de l’eau peut aussi être une opportunité pour la durabilité de l’industrie de la mode. »
La première table ronde de la journée réunissait trois professionnels autour de la gestion de l’eau au cours du processus de tannage. À la tête des Tanneries Haas, fondées en 1842 et réputées pour leur production de cuir de veau, Jean-Christophe Muller expliquait qu’« autrefois, l’eau était considérée comme une ressource inépuisable. Aujourd’hui, aussi bien à l’entrée qu’en sortie de tannerie, l’eau est le principal défi des tanneurs. Depuis 2023, un arrêté ministériel permet aux communes de restreindre les prélèvements quotidiens en eau jusqu’à 25%, ce qui peut équivaloir à une réduction de production lorsque la source de prélèvement (rivière, nappe phréatique ou réseau) est en alerte ». Directeur de Leather UK, l’association des tanneurs au Royaume Uni, et Secrétaire du Conseil International des Tanneurs, Kerry Seniorsignalait que, même la Chine a pris des mesures pour réglementer l’utilisation d’eau. « Pour diminuer notre consommation d’eau, nous avons installé des compteurs d’eau aux points sensibles, sensibilisé le personnel et revu nos process avec notamment des formules modifiées. Mais on ne peut pas modifier les process de tannage trop souvent, poursuivait le directeur des Tanneries Haas. En réduisant les quantités, en recyclant et en réutilisant l’eau, depuis 2018, on est arrivé à économiser 10% d’eau. Avec de nouveaux foulons, du monitoring, la réutilisation de certains bains comme les bains de pré-trempe et une station d’épuration complète, on espère pouvoir réinjecter 50% de l’eau dans le processus ». « Avec la technologie Qualus, consistant à introduire des petites billes de polymère dans le foulon pour faciliter l’action des agents chimiques, on parvient à diminuer de 30 à 50% la quantité d’eau employée pour le tannage, retorquait Kerry Brozyna, Directeur Général de cette société. Cela peut être vital, pour des tanneries situées en zones sous stress hydrique, obligées parfois d’amener l’eau par camions. » Un participant dans le public évoquait la découverte récente d’une méthode de tannage sans eau, avec des foulons sous très haute pression pour « faire rentrer les agents dans la peau ». Informé de cette innovation, monsieur Muller objectait le coût très élevé de cette technique, le risque de brûler les peaux en l’absence de lubrifiant pour amoindrir les frottements et son stade encore expérimental, loin de l’industrialisation. « Nous avons testé un tannage réduisant de 70% la quantité d’eau utilisée ; on a certes produit du cuir mais d’une qualité tout autre que celle de nos cuirs habituels », témoignait encore le tanneur.
La matinée se terminait avec les crocodiliens, dont l’élevage se pose en modèle de durabilité. D’abord parce que, comme le rappelait Grégoire Biasini, Directeur de la Communication de l’ICFA (International Crocodilian Farmers Association), l’élevage a permis de sauver une espèce qui, dans les années 1970, était en danger critique d’extinction à cause de la chasse et de la destruction de zones humides. « Aujourd’hui, grâce à l’élevage, les populations sauvages ont retrouvé des niveaux d’équilibre et les communautés humaines environnantes ont connu un développement local », affirmait-il. Entre 2019 et 2023, la société Authenticae a réalisé une analyse du cycle de vie (ACV) de l’éclosion des œufs en couveuse à l’expédition des peaux dans sept fermes représentant à elles seules 22 à 28% de la production de cuir de crocodile. « Les résultats ont montré que 71% de l’impact sur le climat et 39% de l’impact sur l’eau venaient de l’alimentation des animaux et 50% de l’impact dû aux énergies fossiles sont dus au transport, rapportait le Directeur Technique Karl Flowers. L’élevage a aussi permis de préserver les zones humides. » « La présence des alligators améliore la biodiversité dans les marais et les rend plus résistants aux ouragans car, en se nourrissant des rongeurs, ces prédateurs contribuent à la végétalisation des marais. Les zones humides sont aussi essentielles dans l’absorption du carbone par les sols, expliquait le président de l’ICFA, Nathan Wall. Petit à petit, l’élevage de crocodiles se diversifie ; la viande de crocodile a pris beaucoup de valeur et on a mis au point des patchs de soin contre les brûlures avec l’acide hyaluronique issu des déchets. »
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Rédaction François Gaillard
Photos © Ici Au Loin pour AFCuir.
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