La botte camarguaise, labellisée après la charentaise
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Enjeu stratégique pour tous les acteurs de la filière cuir, la traçabilité, depuis l’élevage des animaux jusqu’à la distribution des produits finis, prend ses marques peu à peu au sein des entreprises. Précurseur en la matière et acteur moteur, le Groupe SVA Jean Rozé a initié, dès 2015, une démarche d’optimisation de la supply chain, effective depuis 2020 sur ses sites de Vitré et Trémorel (Bretagne). De la traçabilité de l’animal au marquage de sa peau, immersion au sein de l’atelier Cuir du site de Vitré.
Adossée à Agromousquetaires (filiale du groupement Les Mousquetaires qui réalise un chiffre d’affaires de 4,4 milliards d’euros), la SVA (Société Vitréenne d’Abattage) Jean Rozé, née en 1955, est dotée d’équipements de pointe conçus sur-mesure. À travers son Pôle Boeuf, elle assure les activités de première jusqu’à la quatrième transformation (soit de l’abattage aux steaks hachés). L’activité d’abattage du site de Vitré concerne 120 000 gros bovins, 80 000 veaux et 250 000 ovins par an. Dans un contexte de décapitalisation du cheptel français – la France a perdu 10% de son cheptel ces six dernières années -, l’amélioration de la qualité des peaux via la traçabilité représente un enjeu majeur.
Argument clé d’une politique RSE, la traçabilité sécurisée assure un suivi à chaque étape de production et de transformation de la matière. Le dispositif technique de traçabilité unitaire des peaux repose sur un cahier des charges particulièrement développé. « La traçabilité est le garant de la qualité. Cet engagement permet à SVA d’accompagner l’amélioration de la qualité des peaux en collaboration avec les éleveurs, de répondre aux attentes sociétales dans une démarche de transparence, et de nous différencier sur des marchés de niche », rappelle Christophe Dehard, en charge de la valorisation des coproduits et du cinquième quartier pour le Pôle bœuf et le Pôle porc au sein de SVA Jean Rozé (il est par ailleurs Président de la Fédération Française des Cuirs et Peaux et Président de l’Alliance France Cuir). 1,3 million d’euros ont ainsi été investis sur les deux sites – Vitré et Trémorel. « La traçabilité est un outil d’assurance devenu indispensable pour les clients », poursuit-il.
« Ce projet au long cours a nécessité un travail d’envergure en amont, développé par un groupe de travail. Outre l’analyse fonctionnelle, l’expression des besoins requis et la mise au point d’un logiciel applicatif à SVA, il était primordial d’impliquer tous les salariés dans le cadre de la conduite du changement afin de faire comprendre l’intérêt et l’objectif de cette démarche. Les opérateurs ont suivi un atelier pédagogique de sensibilisation », se souvient Sébastien Briand du Service Performance Industrielle, Chef de Projet lors de la mise en place de la traçabilité des peaux de bovins pour le site de Vitré.
Comment mettre en place cette traçabilité ? Quelles actions mener ? Où et comment les appliquer ? Autant de challenges pour les équipes du groupe vitréen. Un logiciel sur-mesure a été co-développé par Elisphère, société de services en ingénierie informatique spécialisée dans la filière viande, avec l’équipe informatique d’Agromousquetaires. « Cet outil est évolutif et peut être enrichi de nouvelles fonctionnalités RSE, qualité, production… », ajoute Sébastien Briand. La mise en place d’une solution de traçabilité individuelle des peaux, d’abord de veaux puis de gros bovins, s’est accompagnée de l’installation d’un robot de marquage laser.
Suite à l’opération de dépouille dans le hall d’abattage situé sur le site, les peaux arrivent quelques minutes après dans l’atelier Cuir dédié au salage où règne toute l’année une température ambiante de 8 degrés. La lecture à la douchette du code-barres du numéro national unique d’identification, apposé dès la naissance sur les deux oreilles de l’animal, laisse apparaître sur l’écran informatique sa « carte d’identité ».
Au stade du salage des peaux – automatique pour les gros bovins, manuel pour les veaux -, une étiquette papier est accrochée à même la peau via une entaille effectuée sur le hall d’abattage. Dès lors apparaît à l’écran la cartographie de la peau : un contrôle visuel de l’opérateur permet l’enregistrement des défauts de dépouille pour être ainsi réactif sur les pratiques de dépouilles du hall d’abattage. Au poste dessalage et classement, après le délai requis d’égouttage, l’opérateur bipe le code-barres du plateau, le support en acier sur lequel sont empilées les peaux : la liste des peaux qu’il contient y est détaillée. Le classificateur, une spécialisation que seuls quelques opérateurs détiennent au sein de cet atelier, valide alors le classement final de la qualité de la peau. Ce classement se fait en associant le contrôle des défauts du côté chair et du côté fleur. « L’étiquette, présente à toutes les étapes du traitement des peaux, permet un contrôle rigoureux et renforcé », souligne Laëtitia Le Droff, Responsable Recherche & Développement 1ère et 2ème transformation au sein de la Direction Recherche & Développement.
Puis vient l’étape du marquage au laser. L’outil de la traçabilité matière a été conçu en collaboration avec CTC, Comité Professionnel de Développement Économique de la filière cuir, selon un cahier des charges spécifique (taille de la police de marquage, sur trois lignes, nombre de caractères maximum…). Le marquage à cœur de peau au laser technologie CO2 forte puissance, par un code unique de 12 caractères, qui comprend des informations fiables et sécurisées sur le site d’abattage et l’animal, assure une traçabilité unitaire et physique du cuir. L’intégration de cette technologie dans l’industrie du cuir assure un taux de traçabilité de 96 à 98%.
Les peaux sont ensuite pliées automatiquement et déposées sur palette selon différents scénarios avant expédition, en fonction des catégories de poids, sexe et couleur de la robe de l’animal. « Cette solution complète de traçabilité permet une facturation détaillant le nombre de choix 1 ou 2 expédiés », précise Marie-Cécile Tarriol, Assistante Commerciale et Administration des Ventes Direction Commerciale/Service 5ème quartier – Pôle bœuf. Le marquage de la traçabilité, qui sera lu en automatique dans les tanneries, doit supporter toutes les étapes du processus de tannage. Outre la transparence et le traçage de l’origine des cuirs, cet outil permet des actions ciblées et correctives si nécessaires (en élevage, en abattoir, lors du transport des animaux…). Il renforce par ailleurs les relations et échanges clients en fonction de leurs besoins et permet de lutter contre la contrefaçon.
L’application de la traçabilité s’est concrétisée à travers une collection capsule de Chloé qui est parvenue à retracer toute la chaîne d’approvisionnement et de production des sacs, chaussures et prêt-à-porter de la gamme Chloé Vertical. Telle une « carte d’identité » numérique de ces articles, la maison de mode communique à ses clients des informations complètes sur la traçabilité des produits qu’ils achètent. Son projet Vertical Digital ID cartographie la provenance des matières, ses fournisseurs et fabricants, pleinement impliqués à chaque étape, pour une traçabilité totale. Le Groupe SVA a été partie prenante du projet dès ses prémices, en lien étroit avec les Tanneries Haas et Chloé. « Nos équipes se sont pleinement impliquées dans ce projet innovant et challengeant. La collecte d’un maximum de données concrètes et vérifiées – schémas de traçabilité, Analyse de Cycle de Vie… – visant à répondre aux attentes et besoins de la marque, a conduit à un travail collaboratif, transversal et constructif entre nos trois structures », résume Christophe Dehard. Ou quand une stratégie de traçabilité, qui s’inscrit dans une démarche RSE globale, se concrétise.
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Rédaction Laëtitia Blin
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