La liberté et la passion, l’alchimie du Festival de Hyères selon Jean-Pierre Blanc
Lorsqu’il initie en 1985 la première édition d’un festival de mode dans sa ville, Jean-Pierre Blanc fait un pari un peu fou, celui de promouvoir des ...
Le salon des métiers d’art et de la création revient à Paris du 9 au 12 juin. La 5ème édition se présente comme une exposition culturelle d’envergure, cultivant goût de l’unique et savoir-faire d’excellence. Parmi eux, les métiers du cuir. Marie Barthès, Sébastien Lepeu, Alain Tribeaudot, Laura Puntillo, Serge Amoruso présentent en avant-première les nouvelles facettes de leur vitalité créative.
Après trois ans d’absence, la biennale Révélations est un événement très attendu pour la création contemporaine. Sa notoriété internationale ne cesse en effet de croître depuis son lancement en 2013. « Révélations fait figure de rendez-vous vital pour les artistes de la matière, précise Aude Tahon, présidente d’Ateliers d’Art de France, à l’initiative du salon. Ils sont heureux de retrouver leur marché, leurs clients mais aussi de nouer de nouveaux contacts et collaborations, de rencontrer de nouveaux acheteurs et prescripteurs. Nos métiers d’art sont une force pour l’économie et le rayonnement de la France. Ils concernent aussi bien le patrimoine que la création. La recherche joue un rôle majeur. Il faut faire confiance en la matière, l’explorer, la transformer, la détourner. » Cette matière multiforme met notamment le cuir à l’honneur à travers des pièces exclusives, audacieuses. Elles ont été intégralement réalisées à la main, en atelier, comme toutes les créations rigoureusement sélectionnées sur le salon. Pour les découvrir, rendez-vous au Grand Palais Éphémère.
Marie Barthès fait partie des fidèles de Révélations. « Les artisans d’art ont besoin de montrer leur travail », souligne t-elle. Sculptrice de formation, elle a construit un univers décoratif poétique, où le miroir joue un rôle central. « Il renvoie au présent, il invite à s’interroger, précise l’artiste, dont le miroir Black Drawing – en cuir de la tannerie Tassin – participe à la première vente aux enchères organisée par Piasa sur place. Je poursuis le fil rouge inspiré par Alice au pays des merveilles. Mais je m’éloigne du monde floral. L’eau et la roche m’attirent beaucoup. Mes couleurs sont moins poudrées, plus modernes. Mes dernières pièces sont moins éthérées, plus stables, avec un socle solide. » C’est le cas d’iSo, une variante libre du miroir, composée de trois volumes gainés de cuir, reposant sur un trépied doré. « Le laiton apporte de l’élégance, valorise le cuir et participe au caractère sculptural de la pièce. » Les petits objets, selon elle, se prêtent aussi à l’usage de matières diversifiées. Car Marie Barthès adore les matériaux ! Son préféré est le cuir qu’elle n’hésite pas à griffer, embosser, perforer… Les défauts, les accidents visuels ne la freinent pas, bien au contraire ! Elle récupère ainsi des cuirs issus de stocks dormants, « un mode d’approvisionnement que je privilégie de plus en plus », dit-elle.
Alain Tribeaudot est un profil atypique. « J’ai commencé, dit-il, par m’intéresser à l’impression textile. J’ai successivement appris diverses techniques liées à l’accessoire. J’adore expérimenter. » La dernière de ses explorations est un concept original qui rapproche la maroquinerie…du pain et du café. Pour l’exposer, il n’a pas hésité longtemps sur le choix du salon. « Révélations est bien ciblé. C’est une vitrine de savoir-faire très qualitative. L’artisanat haut de gamme élargit nos champs d’action ». Les sacs qu’il présente empruntent au porte-baguette longiligne et aux sacs à café, proposés dans deux formats (23kg et 1kg). La fabrication a été confiée à l’Atelier Mamet en cuir de vache à tannage végétal, en veau et en agneau issus de stocks dormants. Cette série détournée permet au créateur, par ailleurs passionné de naturopathie, de « traiter d’un sujet brûlant, lié à la mode, à la santé, au respect de la biodiversité tout en mettant en parallèle le temps nécessaire pour fabriquer un sac, du pain ou encore du café ». Un temps long propre à l’artisanat, quel qu’il soit. « Le cuir s’inscrit aussi au cœur des problématiques actuelles. C’est une matière noble, naturelle, durable, que je veux défendre », ajoute-t-il.
Laura Puntillo a appris le design d’objet à Rome avant de s’installer à Paris. Elle travaille comme designer industrielle puis dans une galerie d’art. Mais deux rencontres décisives sont à l’origine de sa vocation pour la chaussure sur mesure : le maître bottier Michel Boudoux au sein de l’Atelier Maurice Arnoult et Philippe Atienza, avec qui elle s’associe pour ouvrir un atelier de botterie au Viaduc des Arts. En 2022, Laura Puntillo reprend l’atelier parisien, réalisant son rêve de développer la botterie femme sur mesure. « Un projet ambitieux mais réalisable », selon elle. L’escarpin en crocodile vert émeraude, souligné d’un passepoil violet et ornementé de plumes – qu’elle expose à Révélations – est en quelque sorte un acte de naissance. « L’escarpin est l’un des modèles féminins les plus difficiles à réaliser. L’équilibre et les proportions sont millimétrés. Je voulais qu’il soit léger visuellement. » Le plumassier Julien Vermeulen a ainsi « habillé » le talon avec des plumes aux couleurs de l’oiseau de Paradis. Un détail couture sur une pièce sur mesure que Laura Puntillo veut diversifier sur ses créations sans sacrifier au confort. « La chaussure féminine est en soi un bel objet, une mini architecture avec laquelle on doit avant tout marcher ! »
C’est aussi au Viaduc des Arts que Serge Amoruso confectionne ses sacs de haute maroquinerie depuis le milieu des années 90. L’artisan, devenu maître d’art, a appris son métier et l’excellence de son savoir-faire à 18 ans à peine, chez Hermès, à l’atelier Malles pour commencer. Son amour pour le cuir n’a plus cessé de grandir. « C’est un matériau sans limite, au toucher unique, avec lequel on peut tout faire », dit-il. Dans son atelier, veau, crocodile, galuchat, cuir de Russie ou encore python démultiplient leurs couleurs mais les peausseries précieuses s’accordent aussi de manière plus inattendue avec le bambou, la fibre de verre, le washi… Soucieux d’innover pour pousser toujours plus loin l’originalité du cuir, Serge Amoruso a ainsi réalisé le sac Kéops, fruit d’une longue histoire artistique. Ce sac à main, coupé, monté, cousu main au point sellier, avec une poignée gainée de sept couches de cuir, est devenu une pièce « signature », revisitée avec imagination. Les musées nationaux de Tokyo et de Pékin l’ont exposé dès 2017 ainsi que des galeries d’art international. Kéops fait l’objet d’un nouvel exercice de style dévoilé sur Révélations, cette fois avec le peintre Tom Geleb. L’œuvre à quatre mains, baptisée Ombres Blanches, évoque un tatouage polynésien, graphique et ethnique. Sac et paravent gainés et peints s’accordent naturellement dans un trompe-l’œil ultra visuel.
C’est auprès d’un sellier maroquinier formé chez les Compagnons du Devoir que Sébastien Lepeu s’est familiarisé avec le cuir et a décidé de se lancer. Sa marque Gustave Maurice porte le prénom de ses deux grand-pères. Dans son atelier parisien, l’artisan se partage entre trois types de produits qui ont chacun leur clientèle : la sellerie maroquinerie à l’élégance classique, des appliques luminaires au design sobre et des sculptures d’oiseaux. Un parti pris insolite qui s’explique par la passion que Sébastien Lepeu nourrit à l’égard des grands échassiers. La commande d’une sculpture animalière par une marque de luxe a servi de point de départ. Depuis, l’artisan a perfectionné son process de fabrication. « C’est un mélange de techniques de cuir et de bricolage. Je pars de la maquette d’une cocotte en papier. Les gabarits en carton me donnent l’idée du volume. J’utilise le cuir à tannage végétal pour sa tenue et sa fermeté. Je le double et le teins sur tranche. Les renforts sont consolidés par une tige de métal. Contrairement à l’origami (une seule pièce de papier plié), l’oiseau se compose d’une cinquantaine de morceaux de cuir, raccordés les uns aux autres. » Sébastien Lepeu a réservé au salon la primeur de sa pièce la plus magistrale : une grue demoiselle à la silhouette élancée, connue sous le nom de Demoiselle de Namibie. Haute de 1,50 mètre, elle a nécessité une armature plus complexe. « Elle est imposante mais légère, ajoute le créateur. Elle a nécessité 250 heures de travail. Elle m’a largement occupé durant les confinements ! »
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Rédaction Nadine Guérin
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