Que ce soit pour s’acheter une respectabilité ou s’inscrire plus durablement dans l’histoire, les relations que la mode entretient avec l’art sont souvent intéressées. Mais Charlotte Cazal ne l’entend pas de cette oreille. Artiste elle-même, formée à l’Université d’Arts Plastiques de Toulouse, cette dernière s’est d’abord reconvertie dans l’impression numérique sur cuir et a fondé La Maison Demeure. Implantée à Roubaix, l’entreprise n’a pas tardé à séduire les marques de mode toujours en quête de fantaisie pour renouveler leur offre. Au fil des collaborations, son savoir-faire s’est étoffé et c’est à présent comme transformateur de matières que cette transfuge du monde de l’art présente sa société. « Notre activité s’est développée suivant trois axes : la création, la recherche et développement et la production industrielle ». Même si l’impression numérique reste centrale dans l’activité de La Maison Demeure et le cuir la matière de référence (99% des commandes).
Mais aujourd’hui, sans pour autant renier ni bien sûr délaisser ses occupations de prestataire, Charlotte Cazal souhaite renouer avec ses premières amours. Et c’est en toute générosité qu’elle entend apporter une aide gratuite à des artistes en mal de notoriété. Lancé en juin 2021, son projet RUINS vise à « accompagner des créateurs dans le développement de leur œuvre en mettant à leur disposition des moyens logistiques, techniques et financiers ». Concrètement, La Maison Demeure met ses locaux et ses machines au service des artistes pour leur permettre de travailler dans la sérénité, détachés des soucis matériels. « Le système des subventions publiques fonctionne mal et la spéculation par les collectionneurs d’art contemporain fausse la donne. Par cette initiative, je veux détacher les artistes du réflexe marchand afin qu’ils puissent se concentrer sur la création, explique cette experte. Nous sommes même à la recherche de mécènes pour attribuer des bourses ».
Pour sélectionner les heureux élus, Charlotte Cazal se fie à son intuition et sa sensibilité portée vers « des œuvres poétiques à fort engagement visuel, à cheval entre le narratif et le conceptuel, plutôt dans la photographie, la sculpture ou le dessin ». Et c’est sur la toile, sur les réseaux sociaux ou par le bouche-à-oreille que cette passionnée déniche ces futurs protégés. En plus du gîte et du couvert, les impétrants peuvent se voir confier une exposition comme la première autour du travail du photographe Yannick Cormier à l’automne dernier ou celle en préparation pour le printemps de l’œuvre photographique de Simon Vansteenwinckel en partenariat avec l’éditeur Light Motiv. Et, cerise sur le gâteau, La Maison Demeure peut acquérir certains coups de foudre de sa dirigeante.
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Rédaction François Gaillard
Photos © Charles Delcourt
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