La botte camarguaise, labellisée après la charentaise
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Plus que centenaire, Bosabo entretient son savoir-faire de sabotier tout en suivant les tendances de la mode pour proposer une offre qualitative et élégante où le cuir occupe une place de choix. Ancrée en région nantaise, la marque cultive une écoresponsabilité quasi atavique.
En matière de traçabilité, Bosabo peut se targuer d’une certaine exemplarité. À commencer par celle de ses origines. Il y a plus de 130 ans, Émile Audouin sillonnait les routes des Mauges, au sud-ouest du département du Maine-et-Loire, pour équiper les familles alentours de sabots de bois. « Il partait avec ses outils et s’installait dans les fermes pendant plusieurs jours pour fabriquer des sabots pour tous les occupants », raconte son arrière-arrière-petit-fils Alexis, à la tête de l’entreprise depuis le début de cette année avec sa sœur Justine. Son fils Joseph reprend la suite dans les années 1920 mais se fixe dans le village de Saint-Rémy-en-Mauges avant que son rejeton, baptisé également Joseph, ne la relocalise à quelques kilomètres, dans le village voisin de Montigné-sur-Moine suite au rachat d’un atelier concurrent. Mais, avec le développement du caoutchouc après-guerre, l’usage des sabots de bois se perd dans les campagnes. Aussi, ce dernier met-il au point un modèle à tige en cuir, plus souple et confortable, préfigurant les sabots d’aujourd’hui. Et c’est son fils, Joëlet son épouse Françoise qui, profitant de la vague baba cool des années 70, font prendre le tournant de la mode à l’entreprise familiale séculaire. « Nos parents ont également donné une dimension internationale à la marque en la présentant dans des salons internationaux. Dès les années 1990, Bosabo exportait au Japon, note Justine Audouin, en charge de la comptabilité et du secteur commercial et marketing de l’entreprise. Ils ont aussi créé la marque Safty-Sabotpour chausser les professionnels des hôpitaux et des collectivités avec des sabots à semelle en polyuréthane et tige en cuir. Mais, face à la forte concurrence asiatique sur ces marchés, cette branche de l’entreprise est en perte de vitesse et ne représente plus que 5 à 10% de l’activité. »
Malgré l’importante évolution des produits et du style, le savoir-faire s’est lui aussi transmis de génération en génération. « Nous utilisons encore de vieilles machines que nous entretenons soigneusement, indique Alexis Audouin, responsable de la production. Nous passons aussi beaucoup de temps à former notre personnel. Le label EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant), obtenu en 2018 et renouvelé en 2023, récompense aussi cet investissement. Le savoir-faire paraît simple mais n’en est pas moins très spécifique. Il faut compter en moyenne 30 à 45 minutes de temps de fabrication par paire et davantage pour les modèles doublés. » Les troncs de hêtres reçus à l’usine sont d’abord débités puis séchés avant d’être façonnés dans l’atelier de menuiserie. Commandées naturelles, les peaux sont teintes sur place pour pouvoir proposer un large choix de coloris sans surcharger les stocks. Celles-ci une fois découpées, les morceaux sont préparés par un parage et un pré-galbage permettant de préformer la tige, avant d’être fixés aux semelles par des agrafes parfois recouvertes de clous. « Le cuir mobilise la plus importante part de notre travail de fabrication, souligne le technicien, qui a intégré l’entreprise en 2016. Même si nous utilisons un peu de textile et du raphia, le cuir est, à plus de 98%, notre matière principale pour les tiges. Nous commandons des épaisseurs conséquentes pour éviter de doubler. Mais les modèles d’hiver à poils requièrent tout de même des doublures. » Les cuirs sont équitablement de tannage minéral ou végétal, et principalement de bovins, dans de nombreuses finitions. « Mais même en tannage végétal, nous avons besoin d’une certaine souplesse », précise Justine Audouin arrivée deux ans après son frère au sein de la société.
La traçabilité environnementale fait aussi partie des valeurs de Bosabo dont l’écoresponsabilité ne date pas d’hier. « Nos parents étaient déjà très sensibles à la problématique écologique », déclarent de concert les deux héritiers. Les cuirs sont commandés en France, en Espagne et en Italie à des tanneries labellisées Leather Working Group (LWG). Le bois des semelles provient de forêts éco-certifiées en Loire-Atlantique, non loin de l’usine, où les arbres sont abattus à maturité et systématiquement remplacés. Les déchets de bois sont recyclés dans l’alimentation de la chaudière de l’atelier et le séchage des semelles. Le liège utilisé pour une ligne de sandales est sourcé en Espagne. Seul le raphia, employé de façon très marginale, est acheté hors de l’Union européenne, à Madagascar précisément. Les emballages sont fournis par une entreprise de la région nantaise. Quant au volet social, l’entreprise n’est pas en reste puisque, comme l’indique le manifeste de la marque pour une mode responsable, éthique et tendance, « chaque collaborateur est qualifié et formé pour être autonome et assurer la totalité des opérations liées à son métier. Cette organisation permet d’offrir un travail diversifié, sans geste répétitif ».
L’offre – à 90% féminine – atteint aujourd’hui les 150 modèles pour le printemps-été, la saison la plus forte pour la marque. « Mais nous possédons plus de 500 modèles en archives », ajoute Justine Audouin. Elle comprend sabots, mules, sandales ainsi que des bottines et des charentaises à tige en cuir doublée de laine de mouton, développées en 2020 pour étoffer la gamme hivernale. Produit historique de la marque, les sabots à semelle de bois génèrent aujourd’hui environ 40% du chiffre d’affaires. Conçus dans les années 1980, les sabots à semelle flexible, comportant une pièce en polyuréthane entre les deux parties en bois de la semelle, représentent environ la moitié des sabots vendus. Lancées en 2010, les sandales à semelle en liège connaissent un succès grandissant et représentent à présent 60% des ventes. Un large éventail de pointures, du 28 au 34 pour l’enfant, du 35 au 41 pour la femme et du 40 au 46 pour l’homme, permet de chausser un large public. Les prix publics des sabots s’échelonnent entre 50 euros pour une paire basique et 200 euros pour les modèles sophistiqués à semelle flexible. Comptez 110 à 180 euros pour les sandales à semelle en liège et une petite centaine d’euros pour les charentaises. Présente dans des grands magasins comme Le Bon Marché Rive Gauche à Paris, Gravity Pope au Canada ou Tomorrow Land au Japon, la marque est majoritairement diffusée dans des boutiques de mode et des concept-stores en France et à l’international. « Une paire sur deux est vendue à l’étranger. Les détaillants chausseurs ne sont pas nos premiers clients mais ils occupent une plus grande part dans notre distribution avec les sandales », note Justine Audouin. Le site internet contribuant, quant à lui, à hauteur de 15% au chiffre d’affaires.
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Rédaction François Gaillard
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