Expo Riva Schuh & Gardabags multiplie les services aux professionnels
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Passionnée de mode et écologiste de longue date, Catherine Dauriac œuvre pour trouver des solutions de développement durable au sein de l’association Fashion Revolution France. Elle nous fait également part de ses espoirs et des améliorations qu’elle attend du cuir.
J’ai fait des études d’histoire de l’art et d’archéologie avec une spécialisation en archéologie précolombienne, où j’ai pu confirmer mon appétence pour les textiles, héritée de mon arrière grand-mère couturière. Mais je n’ai pas poursuivi dans cette voie et, passionnée par la mode, j’ai monté le bureau de presse Côté Cour en 1987. À la fermeture de cette entité en 1996, j’ai pris la direction du bureau de presse d’Hortensia de Hutten, elle se consacrant au salon de jeunes créateurs Workshop qu’elle avait créé en 1993. En 2003, sentant la montée en puissance des grands groupes et la faible place laissée aux créateurs indépendants dans les médias, j’ai bifurqué vers le journalisme en travaillant en freelance pour plusieurs supports. En 2008, j’ai été approchée par la Confédération européenne du lin et du chanvre (CELC) avec laquelle je collabore toujours.
Je suis issue d’une famille alsacienne où, sans être pourtant dans l’indigence, rien ne se perdait. Très tôt, j’ai acquis la conscience de la préciosité des ressources naturelles. J’ai toujours aimé la nature et les animaux. À l’adolescence, j’ai manifesté contre la guerre au Vietnam et le nucléaire. En 2004, j’ai pris conscience de l’urgence écologique et j’ai lancé mon blog Cityzencat dans la foulée. Je suis alors rentrée dans la communauté des blogueurs green. Ce qui m’a permis d’intégrer le blog collectif Ecoloinfo en 2007, avec lequel j’ai collaboré jusqu’en 2016. Mais c’est vraiment l’effondrement du Rana Plaza en 2013 qui m’a mobilisée pour lutter contre les conséquences nocives de la mode sur l’environnement et l’humain. Et en 2015, j’ai rejoint Fashion Revolution, à la communication. Je suis d’une génération qui peut comparer avec le passé et je constate que la société est devenue complètement addict : au sucre, à la technologie, à la consommation, au shopping. Cela pour répondre à une frustration.
Fashion Revolution a été créé en Angleterre par Carry Somers et Orsola de Castro à la suite de la catastrophe du Rana Plaza. C’est une ONG qui œuvre pour la préservation et la restauration de l’environnement ainsi que pour la priorisation des droits humains sur la croissance et le profit. L’antenne française, fondée en 2014, est une association comptant soixante-six membres, dont vingt actifs. J’en ai pris la présidence en 2020. Nous ne sommes pas des activistes comme à Extinction Rebellion. Notre tâche est d’informer et d’éduquer sur de nombreux sujets comme les conditions de travail, la toxicité des teintures, le harcèlement dans les usines, etc. Nous travaillons bénévolement, avec un faible budget et sans locaux. Mais nous sommes convaincus et passionnés.
Nous créons tous les ans un outil : l’index de transparence des marques, qui passe au crible deux cent cinquante marques de mode, du luxe à la grande distribution, et le sustainable playbook qui est un manuel indiquant comment vérifier sa chaîne de valeur ou en créer une propre. Nous donnons beaucoup de conférences dans les grandes écoles comme Sciences Po ou l’ISG ainsi que dans les écoles de mode, partout en France et, l’an prochain, nous prévoyons d’intervenir dans les collèges et les lycées. Nous proposons aussi des ateliers de réparation de vêtements ou de teinture. En septembre 2019, nous avons sorti le premier numéro de la revue Hummade, co-dirigée par Cécile-Jeanne Gayrard et moi-même, et co-éditée par Fashion Revolution à partir de cette année. Nous y parlons du vêtement sous son aspect social, environnemental, politique. Le deuxième numéro est sorti en septembre 2020 et le quatrième opus est prévu pour le premier trimestre 2023. En juillet, nous avons lancé une pétition proposant douze mesures pour aller au-delà de la loi actuellement en préparation à la Commission européenne : Good Clothes Fair Pay. C’est une Initiative Citoyenne Européenne, un outil de démocratie participative, qui requiert un million de signatures émanant de citoyennes et citoyens européens.
En tant que présidente, je suis responsable en mon nom propre de l’association. J’en suis aussi la coordinatrice nationale, en lien avec l’Angleterre, ainsi que la référente pour la communication. J’ai en charge la gestion des partenariats et la recherche de budgets, ce qui n’est pas une mince affaire. Et je dois mener les équipes et veiller à leur réactivité. L’association compte aussi une directrice de l’éducation et une directrice du comité scientifique et de la recherche universitaire, en partenariat avec la faculté d’Oslo. Pendant la période de l’épidémie de Covid-19, nos actions en présentiel ont sensiblement diminué. Même si nous avons compensé en communiquant beaucoup par vidéo, il faut tout de même que nous nous réorganisions.
C’est une belle matière qui, à la base, valorise un déchet. Mais il résulte parfois de méthodes d’élevage que nous dénonçons, comme l’élevage intensif au Brésil qui conduit à la déforestation de milliers d’hectares. Sans être une spécialiste, il me semble que le cuir à tannage végétal est moins problématique. Le tannage au sel de chrome en France et en Europe est certainement bien surveillé ; mais à l’étranger, je crains que les conditions ne soient pas aussi contrôlées. Pareil pour les normes REACH qui sont respectées en Europe mais n’existent pas ailleurs. Il faudrait des lois à l’importation, avec un véritable contrôle. Il faudrait aussi beaucoup d’information pour expliquer la production et permettre au consommateur de choisir entre un produit qui respecte le cadre législatif et un autre qui le contourne. De la transparence dans la RSE et la chaîne de valeurs, en remontant jusqu’à l’élevage. On pourrait aussi utiliser les peaux avec des défauts telles quelles, plutôt que de les recouvrir de produits chimiques ou d’utiliser des matériaux alternatifs enduit d’un surfaçage plastique. Je ne suis pas vegan mais réduire la consommation de viande me semble nécessaire. Et le cuir de crocodile ne me paraît pas indispensable.
Les marques de fast fashion basent leur modèle économique sur la surconsommation de vêtements. Donc sur la surproduction, dans des conditions néfastes pour l’environnement et l’humain. Il ne s’agit pas de stigmatiser la fabrication à l’étranger qui fait vivre l’économie de certains pays ; mais il faut l’améliorer. Les marques de luxe, quant à elles, devraient être exemplaires en proposant de belles matières respectueuses de l’environnement, des produits fabriqués dans des conditions de travail décentes, en étant, pour le cuir, plus solidaires des tanneurs et des éleveurs, comme c’est le cas dans la filière du lin. Les marques de luxe et les marques éco-responsables veulent relocaliser le plus possible leur production en France. Cela va dans le bon sens. Encore faut-il que les métiers manuels soient suffisamment valorisés.
C’est un vrai problème. Je n’ai jamais vu autant de green washing qu’en ce moment, ce qui est logique au vu de l’enjeu que représente maintenant l’écologie pour les marques. Nous avons donc rajouté huit indicateurs dans notre index de la transparence.
Si, en quelque sorte. Mais il est surtout conditionné par un système consumériste. Il faut changer sa mentalité, le rééduquer aux produits de mode, pour qu’il retrouve un plaisir récurrent et non plus seulement instantané avec le vêtement. Cela passe par des propositions auprès des parents et auprès des jeunes, comme la bande dessinée Les héros de l’étoffe qui accompagnait l’exposition de la Cité des Sciences et de l’Industrie sur les Évolutions Industrielles. Ou le livre Fashion que j’ai écrit pour la collection Fake or not de l’éditeur spécialisé dans l’écologie, Tana Éditions, où je m’adresse à une cible jeune de façon accessible et didactique pour la sensibiliser à la problématique écologique. Cet éveil doit aussi se faire à l’école avec notre programme 2023 pour les collèges et lycées autour de l’éducation vestimentaire.
Rédaction François Gaillard
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