Quel commerce dans un monde numérique et écologique ?

La crise sanitaire a entraîné une accélération sans précédent du digital dans notre quotidien : télétravail, visioconférences, médias sociaux, streaming, jeux vidéo… Le monde s’articule désormais plus que jamais autour du numérique. Quelles sont les conséquences de cette hyper digitalisation sur le commerce et les nouveaux modes de consommation ? Plongée dans un secteur en pleine mutation.

L’ère du commerce ambiant

« Avec la pandémie, nous avons atteint un point de non-retour dans la digitalisation de notre quotidien en tant que consommateurs mais également à titre professionnel et personnel », décrypte Nicolas Diacono, Analyste tendances digitales de l’Échangeur BNP Paribas Personal Finance, à l’occasion de la présentation du rapport prospectif Commerce Reloaded 2021, enquête annuelle de l’Échangeur qui passe au crible les évolutions du monde du commerce et les grandes tendances qui le structurent. « L’e-commerce a gagné dix ans de pénétration de marché en seulement huit semaines de pandémie et devrait atteindre 50% des ventes de détail d’ici 2025 aux États-Unis et au Royaume-Uni, soit avec cinq ans d’avance. À la faveur des périodes de confinement, cette numérisation effrénée – parfois à marche forcée – nous a fait entrer dans l’ère du commerce ambiant. Le shop streaming en est une incarnation. » Cette nouvelle forme d’achat en ligne, en provenance d’Asie, se diffuse de plus en plus en Europe et aux États-Unis. Elle se traduit par des sessions de shopping filmées en direct, qui replacent l’humain au cœur du processus d’achat, en donnant la possibilité d’interagir avec le vendeur. En 2019, 430 millions de Chinois ont regardé des streams ; en 2020, ils étaient 560 millions. Le chiffre d’affaires de ce nouveau canal d’achat a doublé en 2020 pour atteindre 134 milliards d’euros, représentant près de 13% du e-commerce en Chine. Une envolée qui incitent les distributeurs, de Carrefour à Walmart, à se lancer dans ce nouveau format de vente.

Fast Shop concept store
Afin de passer le moins de temps possible en boutique, Fast Shop à Sao Paulo propose à ses clients de scanner leurs achats et de se faire livrer par Uber.

Les réseaux sociaux, canaux de vente devenus incontournables

Alors que le social commerce ne cesse de progresser, les médias sociaux, dont l’utilisation a explosé durant cette période, n’ont pas seulement été utilisés pour se divertir. Ainsi l’application mobile TikTok a conclu un partenariat avec Shopify, la solution de création de sites e-commerce. Avec TikTok Shopping, le réseau social chinois entend ainsi permettre aux commerçants de créer et optimiser des campagnes marketing originales, directement depuis le tableau de bord de leur boutique pour booster leurs ventes en touchant une large audience. « Pour les marques et les enseignes, les réseaux sociaux sont désormais des outils à part entière, notamment auprès des jeunes qui ont changé leur modèle d’apprentissage passé en tout distanciel en quelques semaines avec la fermeture des universités et des écoles », considère Nicolas Diacono.

Le magasin physique, lieu d’échanges et d’expériences

Face à cette tendance, le point de vente se transforme pour mieux appréhender les nouveaux usages conduisant au développement de nouveaux concepts. Le fast shopping, qui consiste à passer le moins de temps possible en boutique, en est une illustration. À Sao Paulo, les clients de l’enseigne Fast Shop scannent leurs achats et paient via leur mobile avant de se faire livrer par Uber sous deux heures. Le concept d’Amazon Go, lui, se démocratise au-delà du continent américain : l’enseigne de petits magasins alimentaires sans caisse développée par le géant du e-commerce a déjà posé pieds à Londres. « Le rôle du magasin physique va évoluer considérablement au cours des prochaines années. Son avenir se trouve dans les échanges sociaux, estime Nicolas Diacono. Les boutiques ne seront plus spécialement des lieux d’achat mais plutôt d’expérience. Elles devraient également servir davantage de supports du e-commerce afin de répondre à l’augmentation des commandes en ligne, et intégrer une dimension responsable et durable. »

La logistique, nerf de la guerre

Face à la fermeture des magasins physiques durant les confinements, l’accélération de la digitalisation et une consommation accrue en ligne pourraient aussi transformer les traditionnels points de vente en entrepôts. « Les dark stores, dédiés à la préparation des commandes, se développent. Aux États-Unis, Amazon rachète des boutiques qui ont baissé le rideau pour les transformer en mini hub logistique afin de livrer encore plus rapidement ses clients. En Europe, Glovo, l’application mobile espagnole de commerce rapide, a annoncé vouloir investir 100 millions d’euros pour créer des micro-centres logistiques dans les capitales du vieux continent. » Car qui dit commandes en ligne dit livraisons et, sur ce point, la marge de progression est importante.

L’automatisation des livraisons, mythe ou réalité ?

Selon une étude d’Euromonitor, près de 50% des Européens seraient enclins à se faire livrer par des robots ou des drones si cela permet de raccourcir les délais. 55% des consommateurs souhaitent recevoir leurs achats en deux heures alors que seulement 19% des distributeurs sont aujourd’hui capables d’assurer une livraison en moins de 48 heures. Cette exigence de timing toujours plus court conduit au développement d’innovations technologiques : véhicules autonomes, drones… Ces livraisons automatisées devraient générer un revenu de 33 milliards de dollars en 2030. À l’instar de Meituan Dianping, spécialiste de la vente en ligne de repas, qui a déployé à Pékin sa flotte de véhicules autonomes pour assurer ses livraisons en mode robotisé. La crise sanitaire a accéléré ce développement, conforté par l’assouplissement des réglementations.

L’avenir du commerce numérique rime avec transition écologique

Nous sommes au début d’une nouvelle ère, dont l’économie circulaire fait figure de clé de voûte. Les acteurs doivent repenser le produit dès sa conception afin qu’il soit éco-responsable et durable. En France Castorama propose un isolant issu de textile de jeans, aux États-Unis Lovesac crée des canapés à partir de bouteilles recyclées… » remarque Nicolas Diacono. L’engagement environnemental passe également par le prolongement de la durée de vie des articles et ce, jusqu’au packaging. Audacieuse, la start-up Repack propose des emballages réutilisables pour les commandes en ligne. Une fois le colis reçu, le consommateur est invité à renvoyer le packaging dans n’importe quelle boîte aux lettres du globe – sans frais – au siège de la société qui le remettra dans le circuit. Fin 2020, Decathlon a lancé en Belgique le projet « We play circular » qui s’inscrit dans une logique circulaire et ouvre à la location presque la totalité de ses références à partir d’un abonnement. « Ces solutions nous font entrer dans une économie d’usage et non plus de la propriété », souligne Nicolas Diacono. Ces paradigmes vont-ils conduire à changer nos modes de consommation, à passer d’une hyperconsommation à une consommation plus responsable ? Pour l’heure, le commerce s’efforce de répondre à ces attentes car « pour 90% des jeunes de la génération Z, les entreprises ont le devoir de s’investir contre le réchauffement climatique et de lutter contre les inégalités ».

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Rédaction Laëtitia Blin

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