De l’artisanat au commerce de luxe
Lorsqu’Alphonse et Angèle Lancel créent leur marque en 1876, celle-ci est exclusivement dédiée aux accessoires pour fumeurs. Il faut attendre 1901 et l’arrivée de leur fils Albert à la tête de l’entreprise familiale pour que s’opère le premier véritable tournant dans l’histoire de cette dernière. L’apport d’Albert Lancel va, en effet, être considérable. Celui-ci va tout d’abord définir les quatre principaux univers de la marque, que sont la maroquinerie et l’accessoire féminin et masculin, le bagage et le voyage et, enfin, l’art de vie et l’art du cadeau, aujourd’hui disparu.
C’est avec Albert Lancel, qui lui consacrera toute sa vie, que la maison va définitivement passer du stade artisanal à celui de commerce de luxe, comme en témoigne son installation au n° 8, place de l’Opéra. Le magasin, très novateur pour l’époque, est un véritable concept-store avant l’heure où se vendent, outre les créations Lancel, toutes sortes de produits : des parfums, de l’horlogerie, des services de mariage mais également des luminaires et du petit mobilier. L’enseigne abrite même un auditorium, permettant ainsi la vente de disques et de transistors radio. L’offre, on le voit, est volontairement très large. Car bien que soucieux de conserver les valeurs de la maison familiale, Albert Lancel souhaite insuffler un vent de modernité à la marque, qui multiplie les innovations et dépose ainsi de nombreux brevets techniques. Parmi les nouveautés emblématiques d’alors, citons le briquet automatique (primé à l’Exposition universelle de 1937), le premier poste de radio portable « Bambino», le sac « Parapluie » ou encore la malle « Aviona ». Le goût pour la fantaisie propre à Lancel va également donner naissance à ses célèbres « sacs à malices ». Si l’un surprend par ses compartiments destinés à ranger cigarettes et allumettes et par son cendrier de poche ; l’autre, dite valise « Kangourou », étonne par sa légèreté et sa fonctionnalité, deux caractéristiques très appréciables en cette période d’essor des congés payés et des voyages.
L’entreprise continue de se développer et compte déjà, dans les années 50, plus d’une dizaine de boutiques dans les grandes villes françaises. La décennie suivante, qui est marquée par de nombreuses collaborations – notamment avec Salvador Dali, à l’origine du sac « Daligramme », revisité dans les années 2000 – et par la création de sacs résolument modernes et originaux, renforce encore l’expansion de la marque.