Expérimentation Nativocampana, Vases en cuir et résine, Humberto et Fernando Campana, depuis 2010
Des vases qui semblent être, pour ces deux trublions du design, un vrai territoire d’exploration et d’expérimentations de la matière, hybridation de plaques de cuir découpées ou trouées, et de la résine. Jeu de lumière entre résine translucide et cuir, ils sont le témoignage parfait d’une démarche bien plus complexe qu’il n’y paraît de la part des deux designers brésiliens. Ces vases aux couleurs franches et joyeuses ont une allure aussi intrigante que leurs noms : « Sagarana », « Mulato », « Bromelia », « Olodum »… Quelque chose d’organique, comme en mutation pour ces objets créés pour la collection « Nativocampana » en collaboration avec l’Italien Andrea Corsi, édités et fabriqués à la main en édition limitée par l’éditeur Corsi Design Factory, entreprise née de la rencontre entre Andrea Corsi et le designer Gaetano Pesce. Devenus collector, ils apparaissent depuis, régulièrement, dans les ventes consacrées aux grands noms du design. En 2015, avec le même éditeur, des coupes à fruits ou centres de tables apparaissent sur le marché mariant, là encore, pastilles de cuir multico et résines.
Des objets qui sont aussi symptomatiques de la démarche d’Humberto et Fernando Campana, initiée dans les années 80, à savoir celles de la récupération, du mix de matériaux et de cette rencontre de l’artisanat et de la modernité, de ce dialogue et télescopage des cultures au travers le monde. Un mode de pensée et une philosophie de travail qui restera au cœur de leur démarche dans leur studio « Estudio Campana » de São Paulo fondé en 1984 (Fernando Campanadisparaît en 2022). Certaines de leurs créations – notamment en cuir – ayant d’ores et déjà trouvées leur place parmi les incontournables de l’histoire du design, comme le bien-nommé fauteuil « Leather works », une assise semblant être recouverte de multiples morceaux de cuirs, comme jetés au hasard, certains embossés d’un grain alligator. Ce modèle spectaculaire se décline aussi en cuir doré, avec pas moins 400 pièces de cuir nécessaires à la réalisation de ce meuble. Plus spectaculaire encore, l’« Alligator banquete » semblant être formée d’une multitude de crocodiles réalisés en cuir, prouesse technique et énième démonstration de l’humour qui caractérise aussi l’approche du design des deux frères. Pour Edra, c’est tout un travail de cuir plissé, techniques empruntées aux artisans toscans, qu’ils imaginent pour ce lit « Grinza », une déclinaison du fauteuil du même nom. Lors de la Design Week de Miami en 2015, ce sont encore d’autres gestes d’artisanat populaire qui sont l’inspiration des deux frères, pour la collection de mobilier « Cangaço », soit la rencontre de deux univers, la paille tressée des fameuses chaises Thonet, et les savoir-faire traditionnels du Brésil, avec ces patchworks de cuir colorés et cloutés… C’est donc le dialogue, le décalage, en même temps que la maîtrise des gestes ancestraux, ce va et vient perpétuel entre historicité et avant-garde, appropriation et usage à contre-courant des matériaux, autant de préceptes créatifs qui peuvent définir cette approche de la matière cuir – en particulier – et du design – en général – par les frères qui resteront sans doute les plus connus du design !
Inscrivez-vous à la Newsleather pour recevoir, toutes les deux semaines, un condensé de l’actualité de la filière cuir.