Gotha et first ladies
Classiques, belles matières, lignes immédiatement reconnaissables, souvent copiés mais rarement égalés, ils se balancent au bout des doigts des têtes couronnées ou des premières dames, ce sont les incontournables Kelly, propulsé par la princesse du même nom au rang de star mondiale de la maroquinerie, le Traviata de la maison Launer qui ne pouvait rêver meilleure ambassadrice que Sa Majesté Elizabeth II…ou encore le Lady Dior, présent de la première dame Bernadette Chirac à la Princesse de Galles lors de sa visite officielle en France en 1995, longtemps même nommé le Lady Di par la maison Dior, le sac prendra finalement le nom de Lady Dior. Il est un véritable condensé des codes et de la grammaire Dior, le cannage de la décoration emprunté au mobilier de la maison d’enfance du couturier, les breloques dorés… Il reste le modèle emblématique de la maison, comme le Brillant de la maison belge Delvaux, imaginé en 1958, année de l’Exposition universelle de Bruxelles. Aujourd’hui, on l’aperçoit régulièrement au bras de Sa Majesté la reine Mathilde de Belgique. Pour l’épouse du Président de la République, dont on connaît l’attachement à la maison Louis Vuitton, il n’est pas rare de la voir arborer le modèle Capucine, à tel point que les clientes réclament parfois dans les magasins du malletier, le « sac de Brigitte Macron ».
Working girls
Les créations accompagnent les évolutions et sont aussi l’objet révélateur d’une époque : la femme s’émancipe, condensé de la philosophie Chanel, le 2.55, avec son matelassage emprunté au gilet des joueurs de polo qu’elle rencontre avec Boy Capel à Deauville, sa bandoulière en chaîne qui lui aurait été suggérée, elle, par les ceintures auxquelles les soeurs du pensionnat d’Aubazine, là où grandit la jeune Gabrielle, attachaient leurs clés, la doublure en basane coloris grenat inspirée elle aussi par la couleur de l’uniforme du pensionnat. Imaginé pour libérer les mains et les gestes des femmes, pensé par Chanel dès 1929, puisqu’elle détourne cette année-là, pour son usage personnel, une besace militaire, il est mis au point par Albert Monnot qui dirige alors le département sac et ceinture de la maison de couture. Relifté par Karl Lagerfeld dès son arrivée dans la maison de la rue Cambon, il se déclinera dans une nouvelle version avec ce fameux fermoir au double C. Il est tour à tour nommé Jumbo, Timeless, aujourd’hui commercialisé et décliné, saison après saison, sous le nom de Classique. De l’autre côté des Pyrénées, c’est la maison Loewe qui créée en 1975 son modèle emblématique, l’Amazona, suffisamment vaste, il est dessiné pour accompagner toute la journée d’une femme, du soir au matin, d’abord proposé dans les mythiques nappas de la maison espagnole, il se décline rapidement en toile anagram ou en veau suédé, dont cet inimitable coloris « oro ». En 2013, comme Lagerfeld chez Chanel en 1983, J.W. Anderson, à son arrivée à la direction artistique de Loewe, s’intéresse au potentiel de cette création emblématique en opérant quelques discrets changements de lignes et proposant des déclinaisons de matières et couleurs aussi audacieuses que le prêt-à-porter qu’il imagine pour la griffe.