Naissance et croissance
Les montagnes et les rivières de la région grenobloise ont favorisé très tôt l’élevage caprin et l’implantation de l’activité gantière. Les premières traces de gants remontent au Moyen Âge. Ils se diffusent rapidement en France et à l’étranger dès le XVème siècle. Le Duc de Lesdiguières, désireux de développer le travail du cuir dans le Dauphiné, a ainsi permis au Grenoblois Mathieu Robert de recevoir le titre de gantier parfumeur du Roi en 1606. La corporation des gantiers, établie à Grenoble un siècle plus tard, renforce une croissance continue tout au long du XVIIIème siècle. En 1787, par exemple, la ville compte 64 maîtres gantiers et produit 160 000 douzaines de gants, destinés à la France, l’Allemagne, la Suisse, la Savoie, le Piémont. Le gant fait, en effet, partie intégrante de la silhouette féminine mais aussi masculine. L’atelier de gantier, reconstitué au sein de l’exposition au Musée dauphinois, témoigne de la simplicité d’outils ancestraux qui caractérisent toujours la pratique de l’artisan.
La « révolution Jouvin »
Le gantier occupe une position spécifique, celle de fabricant marchand. Il achète en effet la matière première – la peau de chevreau, fine et délicate, en priorité – qu’il fait transformer en cuir par le mégissier ou qu’il achète, déjà mégissée. Les grandes manufactures du XIXème siècle ouvriront aussi leur propre mégisserie, à l’exemple de Rouillon, importante lignée de gantiers grenoblois. Le gant, traditionnellement, est découpé à la main au ciseau puis cousu, voire ennobli par les couturières et brodeuses. Dès 1820, Grenoble fait les premières tentatives pour mécaniser la coupe. Xavier Jouvin (1801-1844) est considéré comme le « rénovateur de la ganterie grenobloise ». En inventant les pointures de main et la « main de fer », il améliorera considérablement la fabrication du gant sur mesure. Son emporte-pièce métallique, qui permet de découper plusieurs épaisseurs à la fois, est récompensé lors de l’Exposition des produits de l’industrie française en 1839 à Paris puis adopté dans toutes les ganteries. Avec le « procédé Jouvin », l’industrialisation est en marche… La ganterie grenobloise devient un secteur florissant, faisant rayonner son savoir-faire du gant de luxe en chevreau à grande échelle.