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L’artiste Arno Fabre présente à Paris « Les souliers – Quintet ». Une installation insolite, rythmée par le son des chaussures, à découvrir au Maif Social Club, jusqu’au 24 février.
Le plasticien cinquantenaire est curieux par nature et ancré dans le réel. Arno Fabre, installé à Toulouse, a grandi dans le Limousin et a toujours aimé marcher… À travers ses réalisations poétiques, invitées en France et à l’étranger, il se plaît à questionner et renouveler la perception de ce qui compose notre quotidien le plus familier. Comme le simple bruit des pas, à l’origine de son quintet, formé par cinq paires de chaussures. « Tout a commencé en entendant, par une fenêtre ouverte, des gens marcher à l’extérieur. J’ai prêté attention à ce que j’entendais. Une chaussure à talon, par exemple, n’a pas le même son qu’une chaussure plate. C’est également différent à gauche et à droite, si l’on est sur un trottoir ou si l’on traverse la rue. La marche est un langage. Elle est aussi une mécanique passionnante par la complexité physiologique qu’elle met en œuvre. J’ai pensé à la marche collective, à la marche individuelle et bien sûr, à l’astragale, cet os qui exporte tout le poids du corps. L’orchestre de souliers est né », explique-t-il. Le quintet d’Arno Fabre est une installation sonore marquée par le mouvement. Dans un coffre ouvert, cinq paires de chaussures font du surplace. En réalité, elles frappent et frottent le sol selon deux mouvements. Le premier s’apparente à une danse folklorique. Le second évoque une marche militaire finissant en débandade ! Une partition numérique guide les mouvements. L’ensemble est en effet piloté sur ordinateur et actionné mécaniquement par des « piétineurs ». La performance – mi rêverie mi fantaisie – dévoile sa singularité, mêlant arts visuels, musique contemporaine ou encore théâtre de marionnettes revisité. Arno Fabre évoque aussi « un orchestre de chambre assez homogène, comprenant également des dissidents ! Beaucoup de musiques ont été construites au rythme des pas, du galop du cheval, à l’origine du rythme ternaire. La marche crée une pulsation. Elle marque le temps ».
Véritables protagonistes du quintet, les chaussures ne sont pas neuves. Elles ont volontairement toutes vécu. C’est justement ce qui intéresse Arno Fabre, sensible à la chaussure, elle-même, l’un des plus anciens savoir-faire de l’Humanité. Pour lui, le confort, la protection, la solidité sont des composantes intrinsèques à ce « vêtement de pied essentiel ». L’artiste a fourni ses propres chaussures de marche usagées. « Elles ont parcouru beaucoup de kilomètres ! », dit-il. Nos chaussures de randonnée, devenues si courantes sur le marché, empruntent ainsi leur forme à une chaussure montante, à lacets, ultra résistante, popularisée sous le nom de « godillots ». Son inventeur, Alexis Godillot (1816-1893) est célèbre pour avoir révolutionné l’art de chausser les soldats sous Napoléon III. Grâce à lui, pied droit et pied gauche sont différenciés en 1858 et le cuir imperméable remplace la lourde semelle de bois. La manufacture d’Alexis Godillot fut aussi le principal utilisateur de cuir en France. Autre style, autre « classique » iconique ! La « Zizi » de Repetto connaît la célébrité dès que Serge Gainsbourg l’adopte, en version blanche, dans les années 70. L’artiste en consommait une trentaine de paires chaque année ! C’est à Rose Repetto que ce richelieu doit son extrême souplesse : une semelle fine cousue à l’envers avant d’être retournée. Cette invention de 1947 est la marque de fabrique de cette « réinterprétation citadine du chausson de modern jazz ». La santiag est, elle aussi, un modèle reconnaissable entre tous. Cette botte portée à l’origine par les vaqueros espagnols (éleveurs de taureaux et de vaches) fait partie intégrante de l’avènement du style cowboy et de l’esthétique americana. Le vestiaire masculin et féminin plébiscite toujours sa facture artisanale en cuir pleine fleur et ses « signes distinctifs » : bout pointu, talon bisauté, dit « à bascule », tige surpiquée… Pour Arno Fabre, « une santiag, des talons aiguille ou des charentaises ne racontent pas la même histoire ! »
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Rédaction Nadine Guérin
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