Comment vous êtes-vous rapproché du Groupe LVMH ?
Les groupes de luxe sont soucieux de leurs approvisionnements matières. Cette chaîne de valeurs débute à la ferme, chez l’éleveur, passe par l’abattoir, le stock de peaux brutes, puis l’activité de transformation (travail de rivière et mégisserie). Comme de nombreux secteurs aujourd’hui, il n’y a pas de marge dans cette industrie, contre 20-30% de marge brute pour les autres en moyenne, et c’est pour cette raison que de nombreuses tanneries ont fermé leurs portes en France, en Espagne, en Italie…Cette situation est difficile à manager et nous devons apprendre à nous adapter. Dans les 20-30 dernières années, si on exclut le marché de l’automobile qui comporte les plus grandes tanneries, la plupart des entreprises sont des PME familiales. En Espagne, il y avait tant de tanneries quand j’ai commencé à travailler en 1997. On dénombrait 25 000 salariés contre 1 900 aujourd’hui. La même chose s’est produite en France. Toutes les tanneries connues : Annonay, Roux, Dupuy, Haas, Richard, Bodin Joyeux, appartiennent à des groupes, sinon elles n’existeraient plus. C’est très difficile pour nous de faire de la marge à cause du prix des peaux, le process de fabrication qui est long, le niveau de qualité de la matière demandée…Nous avons besoin d’avoir continuellement des peaux en production que nous payons comptant, sans ligne de crédit avec les négociants de peaux brutes. Il faut financer des stocks conséquents et nous ne sommes pas en capacité financière de le faire. C’est ainsi que des grands groupes interviennent au capital de tanneries pour d’une part, sécuriser leurs sources d’approvisionnement, et d’autre part, s’assurer de la conformité de la production.
Quels sont les critères de qualité des groupes de luxe en matière de cuir ?
Les marques sont sérieuses, intelligentes et veulent avoir une ligne de conformité parfaite : du bien-être animal, incluant les conditions d’abattage, jusqu’au processus de fabrication du cuir. Lorsqu’un sac d’une grande valeur est commercialisé, elles doivent s’assurer de la conformité de tous les fournisseurs. Imaginons que nous ayons une capacité de 100 et que les marques nous achètent 200, mais que nous ne puissions pas les faire, nous irions acheter les 100 autres pièces auprès d’autres tanneries, à l’autre bout du monde, ce qui serait une pratique condamnable. Idem, pour les façonniers. Donc les grands groupes préfèrent investir dans les meilleures tanneries comme Riba Guixà, régulièrement auditée par le Leather Working Group et Intertech, tout en s’enquérant des conditions de production. Ces marques, soucieuses de la qualité, sécurité, conformité nous mettent au diapason, ce qui est positif !